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Avec des SY...
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Il fut un temps où la quête d'un synthé pour guitare permettant un "tracking" de notes efficace ressemblait à celle du Graal. Que l'on parle des synthés pour guitare ou des contrôleurs MIDI destinés aux six-cordes, aucun produit sur le marché ne permettait de reproduire le jeu du guitariste jusque dans ses moindres nuances. Pensez donc, pour la plupart, ils n'étaient même pas fichus de reproduire un bend de façon vraiment convaincante... Mais Boss a changé la donne avec le SY-300, un synthétiseur piloté par le signal audio émis par une guitare (ou un autre instrument), sans qu'un micro spécifique soit nécessaire. Outre une idée révolutionnaire, c'est une réussite sur le plan du tracking.

Descrip­tion exté­rieu­re…

Avant de s’at­tar­der sur les perfor­mances et l’as­pect sonore de l’en­gin, commençons par le décrire. Le SY-300 possède un boîtier bleu et semble d’une soli­dité à toute épreuve. Il est conçu comme une pédale mais en plus grand avec des dimen­sions d’en­vi­ron 25 × 19 cm. Niveau contrôles, on dispose de quatre inter­rup­teurs au pied, six poten­tio­mètres et sept boutons, ainsi qu’un écran LCD rétro-éclairé. 

Boss SY-300
Sans les mains: le péda­lier de contrôle permet de gérer les prin­ci­pales fonc­tions du SY-300.

Le panneau arrière est équipé de huit prises au format jack 6,35 mm : une entrée, une sortie « thru » (lais­sant le signal entrant sortir sans être modi­fié), une entrée pour pédale d’ex­pres­sion ou de contrôle, et quatre sorties (sortie prin­ci­pale et « Sub », chacune dispo­sant de canaux droit et gauche sépa­rés). Toujours à l’ar­rière, on trou­vera une prise USB permet­tant la connexion à un ordi­na­teur, l’en­trée pour l’ali­men­ta­tion élec­trique, ainsi qu’une entrée et une sortie MIDI (qui, ne vous embal­lez pas trop vite, ne permettent pas le trans­fert de notes en MIDI, mais unique­ment celui des données de programmes et de contrôles). Un commu­ta­teur de masse (« ground lift ») est égale­ment de la partie.

Le SY-300 est poly­va­lent sur le plan de la connec­ti­vité. On peut le bran­cher à un ampli comme une pédale clas­sique, ou à un ordi­na­teur par le port USB et dans ce cas il fait office d’in­ter­face audio, permet­tant l’en­re­gis­tre­ment direct sur ordi­na­teur. Il faut d’abord télé­char­ger le pilote adéquat, mais il est facile à trou­ver sur le site du fabriquant et l’ins­tal­la­tion se fait en un clin d’oeil. Je l’ai testé sur Mac mais le pilote est aussi dispo­nible pour Windows.

…et inté­rieure

L’in­té­rieur du SY-300 abrite un synthé­ti­seur poly­pho­nique à trois oscil­la­teurs program­mable « façon analo­gique », ainsi que quatre proces­seurs d’ef­fets. Le synthé peut être programmé direc­te­ment via les commandes en façade de l’en­gin. Le sélec­teur rota­tif, qui se trouve être égale­ment un bouton-pous­soir, permet de choi­sir un oscil­la­teur ou un effet à éditer et de navi­guer entre diffé­rents écrans. Les quatre boutons rota­tifs situés juste en dessous de l’écran servent quant à eux à chan­ger les valeurs des para­mètres.

L’in­ter­face est plutôt intui­tive, mais du fait du nombre élevé de para­mètres éditables, il est souvent néces­saire de passer par de nombreux niveaux de menus. Durant la navi­ga­tion au sein des menus, un bouton Exit permet de remon­ter d’un niveau. Graphique­ment, l’in­ter­face est un peu dépas­sée mais au moins c’est effi­cace et ça fait son boulot : nous permettre de navi­guer en nous y retrou­vant.

Cela dit, si vous avez un ordi­na­teur, il y a encore mieux. En télé­char­geant le logi­ciel gratuit Boss Tone Studio for SY-300, vous pouvez éditer la machine sur votre écran d’or­di­na­teur, ce qui rend les choses nette­ment plus faciles (nous y revien­drons plus loin).

Boss SY-300
La face arrière dispose de nombreuses entrées et sorties analo­giques.

Mais reve­nons à l’ar­chi­tec­ture du synthé: vous pouvez choi­sir parmi de nombreuses formes d’onde pour chacun des trois oscil­la­teurs, dont Sine (sinu­soï­dale), Saw (dent de scie), Tri (triangle), Square (carrée), PWM (Modu­la­tion de la Largeur d’Im­pul­sion), Detune Saw, Noise and Input, cette dernière option envoyant le signal entrant de votre guitare. 

L’étape suivante dans le chaîne du signal est la section Filter/Ampli­tude. Elle propose des filtres passe-bas, passe-haut, passe-bande et écré­teur, tous para­mé­trables. Il y a un para­mètre Amp Env Attack (attaque de l’en­ve­loppe d’am­pli­tude), mais même avec la meilleure volonté du monde je n’ai pas réussi à l’ac­ti­ver. Et nous en arri­vons au premier gros défaut de cet appa­reil : son manuel (même en anglais) est terri­ble­ment incom­plet. Le manuel de l’ap­pa­reil lui-même est tout sauf exhaus­tif, quant au logi­ciel Boss Tone Studio for SY-300 il ne semble tout simple­ment pas avoir de manuel du tout (j’ai pour­tant cher­ché sur le site de Boss comme sur le reste du web, sans résul­tat).

L’étape suivante est la section LFO, avec six choix possibles dont sinu­soï­dale, dent de scie, triangle, carrée, random (aléa­toire) et S&H (Sample and Hold) pour chaque oscillo, chacun dispo­sant de para­mètres réglables. Après cela vient la section Seq (pour « séquence »), au sein de laquelle vous pouvez créer une séquence de pitch allant jusqu’à 16 pas, chaque pas pouvant augmen­ter ou abais­ser le signal de 24 demi-tons au maxi­mum. Cette option permet d’ajou­ter une impres­sion de mouve­ment aux notes tenues, et c’est plutôt sympa.

Dans cet exemple sonore, j’ai programmé une séquence en ne jouant que quatre noires à la suite et en pous­sant le sustain de la dernière de façon à permettre d’en­tendre les effets de l’in­té­gra­lité de la séquence:

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La section Layer (couche) vous permet de spéci­fier le registre de chaque oscil­la­teur. Par défaut, chaque oscillo affec­tera l’en­semble des notes, mais vous pouvez para­mé­trer chacun diffé­rem­ment de façon à ce que, comme le ferait une fonc­tion de divi­sion du clavier, certains oscil­la­teurs n’af­fectent que certaines notes.

Ce nouvel exemple utilise la fonc­tion Layer pour empi­ler une guitare, une basse et une flûte :

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Le para­mètre Control/EXP permet d’as­so­cier un para­mètre ou un effet à l’un des trois inter­rup­teurs au pied dont est muni l’ap­pa­reil, faci­li­tant leur acti­va­tion ou désac­ti­va­tion pendant que vous jouez. Par défaut, les contrô­leurs 2 et 3 vous permettent respec­ti­ve­ment de descendre et de remon­ter dans la liste des patches. En live, pouvoir faci­le­ment chan­ger de patch et acti­ver/désac­ti­ver un para­mètre ou un effet se révèle parti­cu­liè­re­ment pratique.

Des effets puis­sants

La section d’ef­fets du SY-300 est puis­sante, ce qui n’est pas une surprise quand on connait la répu­ta­tion de Boss dans le domaine des effets numé­riques. L’en­gin dispose de quatre proces­seurs d’ef­fets indi­vi­duels, chacun offrant de nombreux para­mètres réglables, et pas mal d’op­tions de routage sont propo­sées pour aller de la section dédiée aux oscil­la­teurs jusqu’à celle consa­crée aux effets. Il est possible de router tous les oscil­la­teurs vers tous les effets, ou de para­mé­trer certains oscil­la­teurs pour qu’ils ne passent que par quelques-uns des effets. Cette fonc­tion est plutôt complexe et pas vrai­ment détaillée dans le manuel. Son fonc­tion­ne­ment est partiel­le­ment intui­tif, mais pas complè­te­ment. Dans tous les cas, elle ouvre de nombreuses possi­bi­li­tés sonores. Les effets eux-mêmes font partie inté­grante du son du SY-300.

Chaque proces­seur peut se voir attri­buer l’un des 21 effets diffé­rents dispo­nibles, ce qui n’est pas rien. Parmi eux, on trouve des Chorus, Flan­ger, Phaser; Delay, Reverb, EQ, Compres­seur, Limi­teur, Lo-Fi, Slo-Gear, Over­drive/Distor­tion, Slicer, T. Wah, Tremolo, Uni-V, Pan, et Isola­tor. Il y a égale­ment quelques combi­nai­sons d’ef­fets: Chorus + Reverb, Chorus + Delay et Delay + Reverb.

Tous les effets sont plutôt bons. Le Slicer fait partie de mes favo­ris, il permet de hacher le son en choi­sis­sant parmi 20 patterns. Un exemple:

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De mon point de vue, les desi­gners sonores de chez Boss en ont fait un peu trop en para­mé­trant les effets des diffé­rents patches, surtout les effets d’am­biance. Ce patch (nommé « Motion Filter ») est surchargé en réverbe à mon goût:

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Le logi­ciel Tone Studio

Le logi­ciel Boss Tone Studio for SY-300 est à la fois un éditeur, une biblio­thèque et un portail vers Tone Central, la banque en ligne de patches de Boss basée sur le cloud.

Boss SY-300
Boss Tone Central propose des banques de sons à télé­char­ger gratui­te­ment.

La taille de l’écran et la qualité graphique d’un ordi­na­teur (bien supé­rieures à celles propo­sées par l’af­fi­chage du LCD du SY-300) rendent l’édi­tion des para­mètres via l’ap­pli­ca­tion Tone Studio à la fois plus simple et plus rapide. L’in­ter­face logi­cielle est bien orga­ni­sée et il est facile de s’y retrou­ver, il est même possible de dépla­cer des effets dans la chaîne par glis­ser-dépo­ser.

La fonc­tion biblio­thèque peut être utili­sée pour impor­ter des banques de patches depuis Tone Central, où l’on peut trou­ver nombre de banques créées par des musi­ciens tels qu’Alex Hutchings ou Tamas Bara­bas. La biblio­thèque permet de réor­ga­ni­ser les sons par glis­ser-dépo­ser et de créer des banques (appe­lées « Live­Sets ») conte­nant des patches orga­ni­sés dans un ordre parti­cu­lier dans la pers­pec­tive d’une utili­sa­tion en live. Il est aussi possible de sauve­gar­der les patches sur votre ordi­na­teur pour pouvoir les réim­por­ter ulté­rieu­re­ment. 

A l’usa­ge…

Je garde deux impres­sions fortes de mon test du SY-300. Tout d’abord, le tracking est tout simple­ment excep­tion­nel. Quoi que vous jouiez, il fonc­tionne avec préci­sion : en bends, en pull-offs, en hammer-ons, et ainsi de suite. Il suit même le vibrato de ma guitare, comme vous allez pouvoir l’en­tendre dans l’ex­trait suivant :

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Je n’avais encore jamais vu un synthé pour guitare au tracking aussi effi­cace. Et en plus, pas besoin de micro spéci­fique, il suffit d’y bran­cher sa guitare de la façon la plus conven­tion­nelle qui soit. Mais évidem­ment, puisque c’est un synthé pour guitare, il DOIT bien y avoir un problème quelque part, pas vrai ? Eh bien oui, c’est le cas. Le talon d’Achille du SY-300 est la synthèse sonore qui ne propose pas une si grande variété de sons et qui fina­le­ment déçoit. Alors c’est vrai, il y a trois oscil­la­teurs « façon analo­gique », un synthé, mais les sons produits sont pour beau­coup médiocres et loin d’avoir la chaleur de ceux d’un synthé analo. Je suis inca­pable de dire préci­sé­ment d’où ça vient, mais dans de nombreux cas on n’ob­tient pas « LE son synthé ». Beau­coup sonnent comme une guitare élec­trique surchar­gée d’ef­fets, ce qui provient peut-être du nombre impor­tant de patches qui utilisent le mode Input de l’os­cil­la­teur qui exploite direc­te­ment le son de la guitare, plutôt qu’une forme d’onde synthé­ti­sée.

Boss SY-300
Capture d’écran de l’in­ter­face logi­cielle Tone Studio for SY-300 montrant la page dédiée aux oscil­la­teurs.

Au départ, je pensais que ma décep­tion concer­nant les sons venait d’une mauvaise program­ma­tion de l’une des fonc­tions dans les presets d’ori­gine (ce qui est souvent le cas avec les programmes d’usine), mais même les presets tiers dispo­nibles sur Tone Central ne sonnent pas telle­ment mieux, même si de façon géné­rale ils restent meilleurs. J’en suis arrivé à la conclu­sion que le SY-300 dispose tout simple­ment d’une palette sonore limi­tée. Je ne sais pas quelle en est la raison, vu qu’a priori un synthé doté de 3 oscil­la­teurs devrait être capable de produire davan­tage de varia­tions sonores. De plus, j’au­rais aimé que Boss inclue une sorte de synthèse basée sur des samples ou des formes d’onde dans le moteur logi­ciel du SY-300 de façon à lui permettre de simu­ler des instru­ments. De mon point de vue en tout cas, c’est là l’un des prin­ci­paux inté­rêts d’un synthé pour guitare : pouvoir obte­nir les sons d’autres instru­ments, pas seule­ment des sons venus de l’es­pace ou les sons vibrants typiques d’un synthé. J’ai préféré les sons obte­nus par bran­che­ment sur un ampli à ceux tirés de l’in­ter­face USB. Peut-être est-ce là son utili­sa­tion natu­relle.

En fait, j’ai eu la sensa­tion d’ob­te­nir les sono­ri­tés les plus origi­nales en bran­chant autre chose qu’une guitare ou une basse dans le SY-300. Exemple ici avec un violon élec­trique :

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J’ai aussi tenté le coup avec un lap steel, et cette combi­nai­son s’est révé­lée capable de produire des sons vrai­ment très sympas :

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Au passage, le tracking s’est révélé très effi­cace pour le violon comme pour le lap steel. Voici quelques autres exemples pour que vous puis­siez vous faire une idée des sons dispo­nibles. Le SY-300 se montre très effi­cace sur des guitares aux sons satu­rés. Ici, un patch du nom de Word of Mouth, qui utilise le mode Input (qui utilise direc­te­ment le son de la guitare) sur les trois oscil­la­teurs :

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 Ici, une basse dans le SY-300 avec un patch issu de Tone Central du nom de « Bassa­sau­rus 4 » :

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Enfin, un autre patch qui utilise la section Sequen­cer :

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Conclu­sion

Pour envi­ron 699 €, le SY-300 est un produit révo­lu­tion­naire : LE premier synthé pour guitare à propo­ser un tracking précis et effi­cace. Bien joué de la part de Boss, c’est une avan­cée majeure sur le plan tech­no­lo­gique. Mais du fait de cette effi­ca­cité sur cet aspect précis, j’ai été d’au­tant plus déçu par ses capa­ci­tés sonores sans véri­table inté­rêt. Cela dit, si vous cher­chez avant tout un multi-effets permet­tant d’adjoindre des textures synthé­tiques au signal de votre guitare, vous l’ado­re­rez. Il ferait à coup sûr un ajout de choix pour un pedal­board destiné au live, même si son prix de 699 € dissua­dera à coup sûr beau­coup de candi­dats poten­tiels. Mais si vous cher­chez un synthé pour guitares vous permet­tant de tenir la dragée haute à un vrai clavié­riste, vous risquez d’être déçus.

 

  • Boss SY-300
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7/10
Points forts
  • Tracking très efficace
  • Fonctionne avec n'importe quel instrument électrique ou source audio
  • Quatre processeurs d'effets bien fournis
  • Excellente qualité de fabrication
  • Le pédalier de contrôle en façade est génial pour le live
  • Beaucoup d'entrées et sorties
  • Fonctionne aussi comme interface audio via USB
  • Logiciel Boss Tone Studio for SY-300 gratuit
  • Le logiciel facilite l'édition des paramètres, et dispose d'une fonction bibliothèque
  • Des patches supplémentaires sont disponibles gratuitement via Tone Studio
Points faibles
  • Pas beaucoup de variété au niveau sonore
  • Qualité médiocre de beaucoup des programmes pré-enregistrés
  • Presque aucune émulation d'instrument parmi les programmes pré-enregistrés
  • Le manuel ne fait pas le tour de l'ensemble des fonctions
  • Pas de manuel pour le logiciel Tone Studio

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