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< Tous les avis Empirical Labs Distressor EL8X
coyote14 coyote14

« Efficace, polyvalent mais cher »

Publié le 21/12/13 à 11:21
Distressor signifie "Distortion Compressor". C'est donc avant tout un compresseur mono, mais aussi, et c'est ce qui en fait le principal intérêt selon moi, un générateur de distortion qui rajoute des harmoniques sur vos sources.

La machine est solide, légère, et ne chauffe absolument pas du tout. D'ailleurs, il n'y a ni radiateur, ni même une grille d'aération. Un très bon point.

Connectique réduite au minimum: une entrée et une sortie Mono, en Jack et en XLR. 2 Jacks sont dispos dans le cas d'une utilisation en stéréo (il est "linkable" avec un second Distressor). Attention, pas d'entrée Side-Chain, on ne peut donc commander l'appareil qu'avec les entrées audio, et non avec un signal externe.

UTILISATION

C'est le point fort de la machine, car des choix judicieux ont été faits.

Là où la plupart des compresseurs laissent les utilisateurs choisir un niveau de déclenchement, et, parfois, le Soft Knee, ici, on choisit le niveau d'entrée et de sortie. C'est aussi simple et efficace, puisqu'au lieu d'adapter un niveau de déclenchement à un signal qui serait fixe, on fait l'inverse: le niveau de déclenchement est fixe, et c'est le niveau d'entrée du signal qu'on fait varier. Cela permet aussi de faire varier le niveau souhaité pour le générateur de distortion: on calibre comment on lui "rentre dedans".

On trouve un potard d'attaque et de release, qui sont très bien calibrés en temps de réponse et en amplitude.

Le coeur de la machine est le choix du ratio, qui est le taux de compression. de 1:1 (oui, on verra après) jusqu'à "nuke" (un limiteur très particulier), on a une sorte de pré-sélection non seulement de ratio, mais cela se comporte un peu comme des programmes usine: en changeant le ratio, on ne modifie pas simplement un ratio, on a l'impression (et plus qu'une impression) de changer de compresseur à chaque fois: un des points forts de la machine, et qui en fait sa polyvalence).

On peut utiliser une courbe d'équalisation entre HP et BPF sur l'entrée, afin de choisir, en fonction de la source, quelle sera la plage de fréquences qui déclenchera le compresseur. Ainsi, sur un bus batterie, un réglage HPF évitera de faire pomper toute la batterie avec le seul pied de grosse caisse.

Le Bypass est juste parfait: c'est un true Bypass qui coupe l'effet du compresseur.

Ensuite, on arrive dans la partie "coloration" et saturation du signal de sortie: on peut sortir le signal "dry" dans aucune distortion, ou bien via un filtre HP, une distortion 1 et une distortion 2, l'une générant des harmoniques de 2nd rang, l'autres de 2ng rang et de 3ème rang. On peut ainsi simuler le comportement d'un appareil à lampes ou à transistors, et cette partie là est très bien réussie.

Je termine en parlant du "X" de EL8X: c'est le British Mode, qui reproduit une astuce du compresseur UA1176, où il était possible d'enclencher tous les ratios de compression en même temps. C'est un effet radical, mais musical!

L'appareil est surtout destiné aux régies live, plus encore qu'au studio. Son utilisation très simple, son ergonomie exemplaire et l'efficacité immédiate de ses réglages le prédestine avant tout à ce type d'utilisation. Les vu-mètres à led sont plus réactifs que des vu-mètres à aiguilles et donnent une meilleure visu, notamment des temps d'attaque et de release, on comprend vraiment ce qu'on fait.

QUALITÉ SONORE

Il faut voir l'appareil comme une compilation de compresseurs d'une part, et comme un générateur de distortion d'autre part. J'ai apprécié l'efficacité du compresseur, sans plus, j'ai davantage aimé la partie générateur de distortion.

J'ai longuement testé l'appareil sur toutes sortes de sources, voici les résultats auxquels je suis parvenu:
- Sur les batterie, il est très bon. On atteint une large palette sonore, de la batterie très dynamique, pleine de nuances, jusqu'au son rock. On produit tout ce dont on peut avoir besoin sur une batterie: modifier le contenu spectral en modifiant l'attaque, donner du corps en diminuant l'attaque et en remontant le reste, faire ressortir la couleur de la pièce, ou d'une réverb...Et sur les batteries, le générateur de distortion salope le son de façon efficace, parfois subtile, et jusqu'à la nausée si nécessaire.
- J'ai été moins convaincu sur les guitares et les basses, où il fait le job de façon efficace pour le compresseur. Par contre, il est précieux en rajout de distortion sur les basses.
- Sur les synthés, je l'ai trouvé excellent. Sur les numériques, il rajoute un supplément d'âme, permet d'araser la dynamique pour redonner de la pulpe à un signal trop ciselé, remonte l'ensemble des niveaux. Cela évite, comme souvent sur les numériques, d'avoir à doubler les pistes pour les faire ressortir du mix. Sur les synthés analo, il a fait merveille: sur un Minimoog, par exemple, les oscillateurs ne sont jamais complètement bien tunés (ce qui en fait le charme). Mais, ce faisant, les oscillateurs entrent en opposition de phase à certains moment. Le distressor conserve bien sûr cela, mais remonte le signal quand l'effet de phase le rend trop faible, et redonne la présence nécessaire au synthé, quelque soit le moment. La saturation fait là encore merveille.
Il peut aussi faire ressortir les basses en fond d'un signal, en remontant le niveau général d'un signal et en maîtrisant les attaques parfois violentes.
- Sur les voix, là aussi, il fait le job, mais je n'ai pas trouvé le résultat bien meilleur qu'avec de très bons plugs.

Ce que j'ai beaucoup aimé, c'est, comme je l'indiquais plus haut, le choix des ratios est plus qu'un choix de ratios: même avec un ratio de 1:1, on sent déjà que le signal a subi quelque chose, qu'il dispose d'une plus forte présence. Ensuite, en parcourant les autres ratios, on a le sentiment de changer de compresseur à chaque fois. D'ailleurs, le manuel donne des réglages permettant de simuler tel ou tel compresseur, opto ou pas, à lampes ou à transistors, etc...Et, de fait, le résultat est globalement perceptible. Le British Mod finit de brutaliser le signal, l'écrase définitivement, et il faut clairement préférer l'EL8X à l'EL8 rien que pour cette raison.

L'autre point que j'ai bien aimé, c'est qu'il n'est pas vraiment possible d'avoir un mauvais son avec cet appareil. Même un réglage a priori inadapté procure un résultat parfois surprenant, mais toujours créatif. Il ne faut pas hésiter à sortir des sentiers battus!

AVIS GLOBAL

Puisque cet appareil procure un son au rendez-vous, qu'il est présent dans absolument tous les gros concerts (je suis allé voir la console du concert de Muse l'an dernier, il y avait des batteries de Distressors en pagaille dans les racks...et c'est comme cela à chaque concert que je vais voir, il devient une sorte de standard.), d'où vient le sentiment de déception globale?

Eh bien, je dirais que, quand on l'utilise seul, on n'y trouve que des avantages. Ensuite, on se souvient qu'il est mono et qu'il coûte (en 2013) plus de 1500€ en neuf, et environ 950€ en occasion.

Je l'ai loué pour une session d'enregistrement et de mixage, et il a tenu ses promesses. Je l'ai utilisé à la source, puis également en réamp. Et là, je l'ai comparé avec de bons plugs qui étaient installé sur la station de travail du studio. En compresseur, je suis presque toujours parvenu à faire aussi bien, ou équivalent. Disons qu'il garde un très léger avantage sur les instruments à contenu harmonique riche et varié, les sons percussifs. Sur les voix, les nappes de cordes, les instruments à vent, etc...il faisait bonne figure, sans plus.

La partie Distortion est plus singulière, on arrive à produire ces sons écrasés de basse très présent, ce côté un peu sale des prods actuelles. Là, je n'ai pas testé avec des plugs ou d'autres générateurs d'harmoniques, mais j'ai bien aimé le résultat, dont il ne faut pas abuser, néanmoins.

Je regrette qu'il n'ait pas d'entrée Side Chain, ce qui aurait grandement amélioré le ratio performance / prix.

Je garde le souvenir d'un appareil efficace, coloré, hyper-polyvalent (une sorte de couteau suisse), moderne dans le son et l'interface. Il est solide et va à l'essentiel, donc il est avant tout fait pour la scène. En studio, d'autres solutions hardware ou software, tout aussi efficaces et créatives, existent, et pour moins cher.