Se connecter
Se connecter

ou
Créer un compte

ou
Pédago
43 réactions

La puissance admissible

Les spécifications des enceintes - 4e partie 

La puissance est une notion tout le temps mise en avant, autant chez les vendeurs que chez les utilisateurs d'enceintes. Il semble qu'elle possède un pouvoir supérieur de séduction, au point que sa signification réelle se dissout dans l'image que le grand public s'en est fait. Pour ça, elle est souvent sujette à caution, d'autant plus que la route vers des conditions de test identiques chez tous les constructeurs est encore longue.

Accéder à un autre article de la série...

La théo­rie et la pratique

On peut décrire la puis­sance admis­sible comme la quan­tité de courant élec­trique déli­vrée par l’am­pli qu’une enceinte peut rece­voir. La notion est souvent mal comprise et reste encore trop souvent utili­sée pour compa­rer la qualité de deux enceintes. Pour­tant, elle ne nous renseigne pas du tout sur la pres­sion acous­tique déli­vrée, et donc l’ef­fi­ca­cité d’une enceinte. Elle nous indique la tension maxi­male du signal qu’on peut envoyer dans l’en­ceinte avant qu’elle ne subisse un chan­ge­ment notable de ses carac­té­ris­tiques acous­tiques, méca­niques ou élec­triques. Au mieux, la puis­sance sur la doc d’une enceinte sert à déduire quelle puis­sance d’am­pli on va utili­ser, en fonc­tion des condi­tions d’uti­li­sa­tion. Le piège est qu’il y a plusieurs manières de calcu­ler la puis­sance admis­sible. Les construc­teurs les plus sérieux se démarquent géné­ra­le­ment par l’ex­pli­ca­tion précise des condi­tions de mesure.

La puissance admissible des enceintes de sono

L’équa­tion qui permet de calcu­ler la puis­sance P (en watts) que reçoit une enceinte est P = U2 / Z où U est la tension du signal, en volts, et Z l’im­pé­dance, en ohms. Pour déter­mi­ner le nombre de watts que l’en­ceinte peut encais­ser, un signal test est diffusé à diffé­rents gains. La tension aux bornes de l’en­ceinte est mesu­rée, et connais­sant l’im­pé­dance, on calcule la puis­sance élec­trique reçue. La réac­tion de l’en­ceinte est surveillée, et en fonc­tion de l’al­té­ra­tion de la réponse en fréquence, du taux de distor­sion, d’une éven­tuelle surchauffe de la bobine ou de son dépla­ce­ment exces­sif, une valeur de puis­sance admis­sible est défi­nie.

La durée du test préco­ni­sée par l’Au­dio Engi­nee­ring Society est deux heures. D’autres proto­coles existent (celui de l’Elec­tro­nic Indus­tries Alliance, celui de l’In­ter­na­tio­nal Elec­tro­tech­ni­cal Commis­sion…) et les construc­teurs défi­nissent souvent eux-mêmes leurs condi­tions de mesure, en modi­fiant le signal test, la durée du test ou la manière dont le signal est diffusé (en continu ou pas). Pour que l’uti­li­sa­teur puisse donner du sens au nombre affi­ché, il doit connaître le proto­cole suivi. L’ab­sence de docu­men­ta­tion autour d’une valeur de puis­sance est suspecte.

Puis­sance moyenne et puis­sance peak

La constante varia­tion d’am­pli­tude d’un signal sonore oblige à distin­guer, pour donner du sens au test, un niveau RMS, corres­pon­dant à une sorte de moyenne, bien que diffé­rent de la simple moyenne – root mean square : la racine carré de la moyenne des carrés – et un niveau de crête, corres­pon­dant aux pics de tension dans le signal, donc aux instants très courts durant lesquels la bobine doit se dépla­cer le plus dans le champ magné­tique (typique­ment pour l’at­taque de certains sons). On comprend faci­le­ment ce qu’est la valeur de crête (peak), mais la valeur RMS est souvent confon­due avec la moyenne toute simple. Moyenne et RMS sont diffé­rents mathé­ma­tique­ment. On se sert des valeurs de tension RMS, en volts, pour calcu­ler la puis­sance moyenne (et non RMS), en watts. Si on a deux échan­tillons, un à la valeur 0, le deuxième à +10, leur moyenne est de (0 + 10) / 2 = 5 et leur valeur effi­cace (RMS) est de √(02 + 102) / 2 = √50 = 7,071 . Le terme 'puis­sance RMS’ est un raccourci de langage et n’a pas de réalité physique.

Le facteur de crête

Comme il est utile de connaître la puis­sance admis­sible moyenne, dans la durée, et maxi­mum, dans les brefs pics (quelques milli­se­condes), il est utile que l’écart entre la valeur RMS du signal test et sa valeur peak soit cali­bré, pour que tout le monde parle de la même chose. Le ratio entre les deux est appelé facteur de crête. L’AES préco­nise depuis 2012 (publi­ca­tion qui renou­velle celle de 1984 sur la mesure des perfor­mances d’un haut-parleur) d’uti­li­ser comme signal test un bruit rose avec un facteur de crête de 12 dB, soit un ratio de 4 entre la tension RMS et la tension peak déli­vrée par l’am­pli, et de 16 entre la puis­sance moyenne et la puis­sance peak encais­sée par l’en­ceinte. Le facteur n’était que de 6 dB en 1984, donc un ratio de 2 entre tension RMS et peak, et de 4 entre puis­sance moyenne et peak. La puis­sance varie propor­tion­nel­le­ment au carré de la tension (P = U2 / Z).

enceintes 04 A RMS peak 2

Le facteur de crête du signal test est une info indis­pen­sable pour inter­pré­ter la valeur de puis­sance affi­chée dans les spéci­fi­ca­tions. Grâce au signal ainsi norma­lisé, on déduit la puis­sance peak à partir de la puis­sance moyenne, et vice versa. On peut alors envi­sa­ger, avec les spéci­fi­ca­tions des amplis en face, et en fonc­tion du type d’uti­li­sa­tion prévue, de déter­mi­ner la puis­sance d’am­pli­fi­ca­tion adéquate à l’en­ceinte.

On rencontre aussi, dans les spéci­fi­ca­tions d’une enceinte, la notion de 'puis­sance program­me’. Elle corres­pond à un certain nombre de fois (laissé à l’ap­pré­cia­tion des construc­teurs) la puis­sance moyenne, et donne en fait une puis­sance d’am­pli­fi­ca­tion que le construc­teur juge adap­tée à l’en­ceinte (souvent 2 × la puis­sance moyenne). Il en est de même de la 'puis­sance musi­ca­le’ : le construc­teur fait une esti­ma­tion de la puis­sance recom­man­dée, pour un usage de l’en­ceinte avec de la musique. Mais quelle musique ? Du jazz non compressé ou de la musique élec­tro­nique avec un écart entre les niveaux les plus faibles et les plus forts (la dyna­mique) très réduit, on se sait pas…

← Article précédent dans la série :
Comprendre l’impédance
Article suivant dans la série :
La sensibilité et le rendement →

Vous souhaitez réagir à cet article ?

Se connecter
Devenir membre