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Pédago
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La panoramique selon Craig Anderton

Les lois de la panoramique

Le concept de la panoramique est évident pour tout le monde. On tourne un bouton Pan réel ou virtuel pour placer le son dans le champ stéréo.

Mais nul n’est censé igno­rer la loi – dans notre cas, les règles de la pano­ra­mique. Ces lois, qui défi­nissent exac­te­ment ce qui se passe quand un signal mono se déplace de gauche à droite dans le champ stéréo, peuvent varier d’un produit à l’autre, qu’il soit maté­riel ou logi­ciel. En tout cas, il est néces­saire de connaître les règles de la pano­ra­mique afin d’évi­ter tout problème en cas de trans­fert du projet d’un programme hôte vers un autre. Les lois de la pano­ra­mique sont même à l’ori­gine de sottises qu’on peut lire sur la toile où d’au­cuns affirment que certaines appli­ca­tions hôtes ont plus de « punch » que d’autres, phéno­mène qu’ils ont remarqué en char­geant leurs projets dans diffé­rents programmes. C’est le même projet, non ? Donc, il doit sonner de la même façon, on est d’ac­cord !

Et pour­tant, pas néces­sai­re­ment… voyons pourquoi.

 

Origine des lois de la pano­ra­mique

 

Les règles de la pano­ra­mique trouvent leur origine à l’époque des tables de mixage analo­giques. On modi­fiait la posi­tion stéréo par augmen­ta­tion linéaire du gain d’un canal et réduc­tion linéaire du gain de l’autre. Avec ce système, à la posi­tion centrale, la somme des deux canaux sonnait plus fort que lorsque le signal se trou­vait à une extré­mité du champ stéréo.

Pour compen­ser ce déséqui­libre, on a pris l’ha­bi­tude d’uti­li­ser une régu­la­tion de gain loga­rith­mique qui abaisse le niveau du signal jusqu’à –3 dB RMS en posi­tion centrale. Concrè­te­ment, on pouvait utili­ser des doubles potards de Pan à courbes log/anti-log, mais ils étaient plutôt rares. On a donc fait à peu près la même chose en modi­fiant la réponse des poten­tio­mètres linéaires avec des tran­sis­tors. Ainsi, même en ajou­tant les canaux gauche et droit, le niveau sonore perçu restait inchangé en posi­tion centrale en raison de l’éner­gie constante du signal.

 

Mais cette règle était discu­tée. Certains ingé­nieurs abais­saient encore le niveau en posi­tion centrale, soit parce qu’ils aimaient que le signal semble sonner plus fort lorsqu’il sort de la zone centrale, soit parce que les signaux qui s’amon­cellent autour du centre tendent à « rendre le signal mono ». Ainsi, en abais­sant légè­re­ment leurs niveaux, ils renforçaient l’illu­sion stéréo. Bref, certains utili­sa­teurs de consoles analo­giques avaient leurs petits secrets pour modi­fier les carac­té­ris­tiques de la pano­ra­mique.

 

Pano­ra­mique et stations audio­nu­mé­riques

 

Avec les mixeurs virtuels, nous n’avons plus le problème des doubles potards et nous pouvons même choi­sir la carac­té­ris­tique dési­rée. C’est une bonne chose parce que ça permet une grande poly­va­lence. Mais cela a aussi créé une certaine confu­sion.

Par exemple, la boîte de dialogue de confi­gu­ra­tion d’un projet Cubase SX3 propose quatre règles de pano­ra­mique ; pour y accé­der, allez dans Projet > Confi­gu­ra­tion du projet.

 

Loi de panoramique dans Cubase

La loi de pano­ra­mique par défaut de Cubase consiste en une réduc­tion du niveau central de –3 dB,

ce qui corres­pond à la règle clas­sique de l’éner­gie constante.

 

En revanche, en sélec­tion­nant 0 dB, on retrouve la vieille école avec son effet de « canal central plus fort ». Sachant les diffi­cul­tés rencon­trées pour se défaire de ce système, il n’est pas surpre­nant que Cubase utilise par défaut le système clas­sique à éner­gie constante (-3 dB au centre). Mais vous pouvez aussi opter pour une atté­nua­tion centrale de –4,5 ou –6 dB si vous préfé­rez renfor­cer légè­re­ment les extré­mi­tés du champ stéréo et assa­gir un peu le centre. Pas mal, c’est sympa d’avoir ces possi­bi­li­tés.

 

En mode multi­piste, Adobe Audi­tion possède deux options de pano­ra­mique auxquelles on accède grâce à Aperçu > Proprié­tés avan­cées de la session.

 

Loi de panoramique dans AuditionAdobe Audi­tion vous permet de choi­sir entre les deux règles de pano­ra­mique tradi­tion­nelles.

 

« Atté­nua­tion loga­rith­mique G/D » est le réglage par défaut qui déplace le signal vers la gauche en rédui­sant le volume du canal droit et, inver­se­ment, déplace le signal vers la droite en abais­sant le canal gauche. Lorsque le signal est à une extré­mité, le volume du canal dans lequel se trouve le signal n’aug­mente pas au-delà de ce qu’il aurait été si le signal avait été centré. L’op­tion « Sinu­soï­dale à éner­gie constante » main­tient une éner­gie constante en ampli­fiant les signaux de +3 dB aux extré­mi­tés. Cette concep­tion est simi­laire à la solu­tion clas­sique de réduc­tion du niveau des deux canaux de –3 dB lorsque le signal est centré.

 

Sonar va un peu plus loin en propo­sant six options de pano­ra­mique que vous trou­ve­rez dans Options > Audio.

 

Loi de panoramique dans SonarSonar vous permet de choi­sir parmi six règles diffé­rentes.

 

Dans les descrip­tions ci-dessous, la forme de la courbe de gain n’a pas d’ef­fet radi­cal sur le son. Les six options sont :

 

  • Centre 0 dB, courbe sin/cos, éner­gie constante. Le niveau reste à 0 dB quand le signal est centré, et augmente de +3 dB quand il est à une extré­mité. Bien qu’il s’agisse du réglage par défaut, je ne le recom­mande pas parce que de l’écrê­tage (clip­ping) peut appa­raître si vous dépla­cez un signal de niveau très élevé du centre vers un côté.
  • Centre 0 dB, courbe carrée, éner­gie constante. Ce réglage est simi­laire mais la forme de la courbe de gain est diffé­rente.
  • Centre –3 dB, courbe sin/cos, éner­gie constante. Le niveau reste à 0 dB lorsque le signal est à une extré­mité et descend à –3 dB dans chaque canal quand il est en posi­tion centrale. Ce réglage est iden­tique à la confi­gu­ra­tion par défaut de Cubase SX.
  • Centre –3 dB, courbe carrée, éner­gie constante. Ce réglage est simi­laire mais la forme de la courbe de gain est diffé­rente.
  • Centre –6 dB, courbe linéaire. Le niveau reste à 0 dB lorsque le signal est à une extré­mité et descend à –6 dB en posi­tion centrale. Pour compen­ser le passage d’un mix stéréo à un mix mono.
  • Centre 0 dB, réglage de balance. Le signal garde un niveau constant qu’il soit tout à gauche, tout à droite ou en posi­tion centrale.

 

On peut vrai­ment voir les consé­quences des diffé­rentes options de pano­ra­mique.

 

Niveaux en fonction de la loi de panoramiqueCette capture d’écran montre l’af­fi­chage des niveaux dans Sonar avec deux lois de pano­ra­mique diffé­rentes.

(Notez que la loi de pano­ra­mique est un para­mètre global que l’on ne peut pas régler indi­vi­duel­le­ment dans chaque piste.
Cette illus­tra­tion combine donc deux captures d’écran distinctes.)

 

L’af­fi­cheur du haut indique un signal mono centré tandis que le second affi­cheur repré­sente le même signal placé tout à droite. L’op­tion utili­sée est Centre 0 dB, réglage de balance. Le niveau RMS est le même quand le signal est centré ou placé tout à droite.

Le troi­sième affi­cheur montre le même signal centré dans un projet utili­sant la règle de pano­ra­mique Centre –6 dB, courbe linéaire. Remarquez que le niveau indiqué est –9 dB (les affi­cheurs indiquent le niveau RMS sur une plage de 24 dB). Le quatrième vu-mètre montre ce qui se passe quand ce même signal est placé tout à droite : son niveau a augmenté de 6 dB (il est à –3 dB).

 

Quelle est la meilleure loi ?

 

En compa­rant les trois programmes mention­nés ci-dessus, vous remarque­rez que leur confi­gu­ra­tion par défaut est diffé­rente !

Cela devient un véri­table problème au moment de trans­fé­rer un projet d’un séquen­ceur dans l’autre – sauf si vous véri­fiez bien que les règles de pano­ra­mique utili­sées sont les mêmes. Je suis souvent étonné par les gens qui affirment qu’un séquen­ceur hôte a plus de « punch » qu’un autre. En fait, celui qui sonne « punchy » ampli­fie le niveau des signaux aux extré­mi­tés du champ stéréo, tandis que les autres utilisent la règle qui atté­nue le niveau des signaux centrés.

 

Par exemple, suppo­sons que vous portiez un projet Sonar sur Cubase SX. Le son du projet sera plus doux parce que Cubase atté­nue le « canal central » tandis que Sonar « ampli­fie les canaux gauche et droit » pour compen­ser l’écart de niveau. Inver­se­ment, en trans­fé­rant un projet Cubase SX sur Sonar, vous rencon­tre­rez peut-être des problèmes de distor­sion parce que le niveau des signaux aux extré­mi­tés du champ stéréo aura été ampli­fié.

 

Et imagi­nez l’im­por­tance que prennent ces règles trans­po­sées au champ surround où il s’agit de compor­te­ment spatial sur un ensemble d’en­ceintes. Donc, soyez cohé­rent quand vous sélec­tion­nez la loi de pano­ra­mique et docu­men­tez votre choix dans le fichier en cas de trans­fert du projet d’une plate-forme à l’autre.

 

Person­nel­le­ment, j’opte pour l’op­tion éprou­vée et approu­vée du centre à –3 dB. J’ai conçu des tables de mixage analo­giques de sorte qu’elles utilisent ce type de réponse et je suis extrê­me­ment heureux de perpé­tuer cette tradi­tion lorsque je travaille avec des séquen­ceurs. Et puis cette loi de pano­ra­mique est dispo­nible dans quasi­ment tous les séquen­ceurs hôtes, tandis que les règles plus « fantai­sistes » des uns ne sont pas forcé­ment compa­tibles avec les autres.

 

Conclu­sion

 

Impos­sible de conclure sans évoquer une dernière chose : la règle de pano­ra­mique que vous choi­sis­sez ne dépend pas seule­ment des critères de faci­lité ou de compa­ti­bi­lité, bien que ce dernier point soit impor­tant pour trans­fé­rer vos projets d’un hôte à l’autre. La règle que vous choi­sis­sez peut avoir une influence sur le son global d’un mix.

 

Cela n’est pas très problé­ma­tique si vous utili­sez essen­tiel­le­ment des pistes stéréo, auquel cas la répar­ti­tion dans le champ stéréo est une ques­tion d’équi­libre (balance). Mais pour beau­coup d’entre nous, le multi­piste signi­fie encore enre­gis­trer au moins quelques pistes en mono. Géné­ra­le­ment, j’en­re­gistre les sources mono (voix, guitare, basse) en mono, sauf si la capture de la pièce est souhai­tée. Dans ce cas, je préfère enre­gis­trer la source en mono et utili­ser un couple de micros d’am­biance (ou un trai­te­ment stéréo) sur des pistes sépa­rées. Et dès que vous dépla­cez des pistes mono dans le champ stéréo, vous êtes confronté aux lois de la pano­ra­mique.

 

Mais vous en savez main­te­nant assez sur ces lois pour ne plus risquer être cité pour outrage à la cour.

 

Origi­nel­le­ment écrit en anglais par Craig Ander­ton et publié sur Harmony Central.

Traduit en français avec leur aimable auto­ri­sa­tion.


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