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Roland Jupiter-4
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Test du Jupiter-4 de Roland

Clavier synthétiseur analogique de la marque Roland appartenant à la série Jupiter

Test écrit
150 réactions
Big Four
8/10
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En 1978, Roland présente son premier synthé polyphonique compact contrôlé par microprocesseur. Le JP-4 est l’un des rares synthés à mémoires avec ce gros son si prisé tout droit sorti des seventies…

Test du Jupiter-4 de Roland : Big Four

Dans les années 70, on assiste à plusieurs tour­nants dans le monde de la synthèse sonore. Au début de la décen­nie, les premiers synthés compacts voient le jour, simpli­fiant consi­dé­ra­ble­ment l’ap­proche du gigan­tisme modu­laire alors de mise. Tout en se compac­ti­fiant, les machines se démo­cra­tisent, sous l’im­pul­sion notam­ment des marques japo­naises qui emboitent le pas aux marques améri­caines, plus élitistes. Vers la fin de la décen­nie, un nouveau tour­nant s’amorce : d’une part, les circuits se minia­tu­risent et s’in­tègrent ; d’autre part, le numé­rique commence à poin­ter le bout de ses bits.

C’est ainsi qu’en 1978, on assiste à l’ar­ri­vée quasi simul­ta­née de deux synthés poly­pho­niques à mémoires : le Prophet-5 signé Sequen­tial Circuits et le Jupi­ter-4 signé Roland. Ce dernier hérite de la signa­ture sonore des mono­pho­niques de la marque (SH) : un son brut et épais, enri­chi par un unis­son dévas­ta­teur. Le JP-4 va évoluer en même temps que la tech­no­lo­gie. Il connai­tra plusieurs versions, pana­chant diffé­rentes révi­sions de cartes internes, la prin­ci­pale concer­nant la carte voix : les premières séries sont équi­pées de filtres à base de 4 OTA BA662 maison (Rev A-B-C-D), les suivantes intègrent le fameux CI IR3109 maison (Rev E), celui-là même qui équi­pera ensuite les JP-8, Juno-60 et JX-3P. Nous testons ici un JP-4 Rev D (filtres BA662), qu’une légende urbaine veut plus gras et plus puis­sant, chose que nous ne pour­rons hélas pas véri­fier en vrai, confi­nés que nous sommes jusqu’aux oreilles.

Gros pataud

JP-4_2tof 02Avec un look mi-synthé, mi-orgue, le JP-4 n’a pas dû gagner beau­coup de concours de beauté dans sa carrière. Tout en métal avec ses flancs plaqués bois hauts et épais, l’ap­pa­reil est robuste et mastoc : 19 kg pour 95 × 41 × 18 cm ! Une partie des commandes est située dans l’épaisse bande sous le clavier, ce qui lui donne un air pataud. Elles concernent l’ac­cor­dage global, l’ef­fet d’en­semble, le motif d’ar­pé­gia­teur, le mode de voix, le main­tien du son, les 8 mémoires et les 10 Presets. Les commandes de synthèse, peu nombreuses, sont alignées en partie supé­rieure de la façade : volume global, trig­ger, S&H sur VCF, LFO, VCO, VCF, enve­loppes. Soit 20 curseurs, 3 rota­tifs et 9 inter­rup­teurs : pas de quoi se perdre ! À gauche du clavier statique 4 octaves très bruyant à course moyenne (iden­tique à celui des RS-505 et VP-330), on trouve les modu­la­tions temps réel : bâton laté­ral à ressort assi­gnable et commandes de porta­mento, soit 3 rota­tifs et 5 inter­rup­teurs supplé­men­taires.

La connec­tique est située sur le panneau arrière : sortie casque (avec sélec­teur à 3 niveaux), sorties lignes mono/stéréo (avec sélec­teur à 3 niveaux aussi), entrée pour pédale de main­tien (inter­rup­teur alter­nant le mode tenu et le mode relâ­ché), entrée CV vers le filtre, entrée CV vers le volume et entrée synchro (pour l’ar­pé­gia­teur et le S&H du VCF). Tout ce beau monde est au format jack 6,35. Il n’y a pas d’en­trée audio vers le filtre ou l’ef­fet d’en­semble, dommage. Il n’y a pas non plus d’en­trées/sorties CV/Gate. Une plaque perfo­rée permet d’ac­cé­der à quatre ajus­tables pour accor­der les oscil­la­teurs au fur et à mesure qu’ils partent en sucette, la machine n’étant pas équi­pée d’ Auto­tune. Sur notre JP-4, l’in­ter­face MIDI Io a pris la place de cette plaque ; heureu­se­ment qu’elle est bien stable, ce qui ne semble pas être le cas sur tous les JP-4 ! Bref, le JP-4 va droit au but, que ce soit au plan commandes ou connec­tique…

Gras et puis­sant

Le JP-4 néces­site appa­rem­ment un temps de chauffe non négli­geable pour se stabi­li­ser. Nous avons entendu les pires histoires sur le sujet, aucun problème à signa­ler de notre côté ; touchons du bois plaqué.

JP-4_2tof 19La mémoire interne est consti­tuée, nous l’avons dit, de 10 Presets et 8 empla­ce­ments libres. Les Presets portent des noms qui n’ont qu’un rapport loin­tain à leur sono­rité : Bass, String, Funky Clavi, Piano, Voice, Trom­bone, Sax, Trum­pet, Synth, The Force. Pas de quoi se rele­ver la nuit, autant créer ses propres sons. Les mémoires libres ne peuvent pas être éditées une fois écrites, comme sur certains synthés à mémoires de cette époque ( OB-1, Kobol, CS20/ 40M…). Cela néces­site de repar­tir de zéro quand on veut chan­ger un réglage ou d’équi­per la machine d’un kit Io (voir enca­dré), grrr.

Là où le JP-4 excelle, c’est dans les sons cuivrés à attaque rapide, les poly­synths funk et les basses à l’unis­son. Avec un filtre légè­re­ment fermé par l’en­ve­loppe avec déclin rapide, on peut appré­cier le bon son bien gras. Le sous-oscil­la­teur vient enfon­cer le clou, histoire de mettre tout le monde d’ac­cord dans les infra­basses. Pas la peine d’être toujours à l’unis­son, d’ailleurs, pour sortir de grosses basses. Les enve­loppes ultra­ra­pides permettent de créer des sons qui giclent parfai­te­ment dans un mix. L’ef­fet d’en­semble fait merveille sur les nappes, les cuivres et, d’une façon géné­rale, avec tous les sons, même les basses. Il a le bon goût d’élar­gir et réchauf­fer le son sans déna­tu­rer son essence. Du coup, tous les escients sont bons pour en abuser. Pour les effets spéciaux, le LFO poussé en mode audio fait des merveilles, de type Ring Mod. Il en est de même pour l’ar­pé­gia­teur simpliste à quatre octaves, les fans de Duran Duran en fredonnent déjà Rio. Bref, si le JP-8 est un synthé plutôt clean et racé, le JP-4 est à ranger plutôt dans la caté­go­rie des teigneux bruts de décof­frage. 

JP-4_1audio 01 Unis­son Bass
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  • JP-4_1audio 01 Unis­son Bass01:05
  • JP-4_1audio 02 Dont Mono­bass00:19
  • JP-4_1audio 03 Dont Chords00:20
  • JP-4_1audio 04 Crazy Poly00:22
  • JP-4_1audio 05 Aimer Fort00:36
  • JP-4_1audio 06 Soft Brass00:25
  • JP-4_1audio 07 Random Arp01:22
  • JP-4_1audio 08 Poly BA66200:35
  • JP-4_1audio 09 Doux Duran01:17
  • JP-4_1audio 10 Saved Prayer00:23
  • JP-4_1audio 11 Inv Env00:23
  • JP-4_1audio 12 Hi Q01:20
  • JP-4_1audio 13 Rez Bass01:05
  • JP-4_1audio 14 Hi LFO00:57
  • JP-4_1audio 15 Self Noise01:27

Quatre coups

JP-4_3schema 01Le JP- 4 est un synthé poly­pho­nique quatre voix mono­tim­bral. Les voix peuvent être action­nées de quatre manières : poly­pho­nie cyclique (idéale pour les arpèges), poly­pho­nie assi­gnée (idéale pour le porta­mento poly­pho­nique), unis­son totale (mono) avec prio­rité à la note basse et unis­son variable (poly) en fonc­tion du nombre de notes jouées. Bref, c’est très bien pensé, compte tenu du nombre réduit de voix ! On regrette juste l’ab­sence de réglage de désac­cor­dage entre les voix en mode unis­son. Chaque voix est produite par une carte élec­tro­nique (Module Board) enfi­chée à la verti­cale sur la carte mère. La carte voix comprend un VCO discret, un sous-oscil­la­teur, un filtre passe-haut statique, un filtre passe-bas dyna­mique et deux enve­loppes. Le VCO peut produire les ondes dent de scie, carrée ou impul­sion variable (non simul­ta­nées). La largeur d’im­pul­sion peut être réglée à la main (4 posi­tions unique­ment : 10, 20, 40, 50 %) ou modu­lée par le LFO (4 inten­si­tés de modu­la­tion). Le LFO peut aussi modu­ler le pitch, cette fois avec un réglage fin par curseur. Le sous-oscil­la­teur fonc­tionne à l’oc­tave (simple marche/arrêt) et produit une onde carrée fixe. Comme il n’y a qu’un oscil­la­teur par voix, on peut tout de suite oublier les inter­mo­du­la­tions (synchro, ring mod, cross mod), le JP-4 est vrai­ment rustique. Côté sources, il reste un géné­ra­teur de bruit (global pour les quatre voix), puis on attaque les filtres.

JP-4_2tof 24On commence par un filtre passe-haut statique (40Hz-5kHz), puis on entre dans le VCF placé juste derrière. Il s’agit d’un filtre passe-bas réso­nant 4 pôles. Ce filtre est vrai­ment sans pitié et d’une qualité sonore excep­tion­nelle. De tous les Jupi­ter, c’est celui qui a le plus de carac­tère. La fréquence est direc­te­ment modu­lable par le suivi de clavier (4 posi­tions : 10, 40, 70, 100 %), le LFO (curseur posi­tif) et l’en­ve­loppe dédiée (curseur posi­tif + inver­seur, chouette !). Mani­pu­ler direc­te­ment le curseur crée des pas audibles unique­ment à réso­nance élevée, pas surpre­nant avec 6 bits de réso­lu­tion (64 valeurs). La réso­nance, vrai­ment barrée, pousse le filtre en auto-oscil­la­tion, en écra­sant pas mal les fréquences. Heureu­se­ment, un curseur de niveau sur le VCA (avec LED de satu­ra­tion) permet de compen­ser en grande partie la perte de niveau, bien vu !

Le VCA dispose de sa propre enve­loppe. En sortie de VCA, on trouve un effet d’en­semble (simple marche/arrêt, non mémo­risé). Il est vrai­ment magique, avec une très belle stéréo et un respect total du carac­tère sonore. Présent et utile, sans être étouf­fant. 

Modu­la­tions figées

JP-4_2tof 11Les premiers synthés compacts Roland ne sont pas répu­tés pour la souplesse et la géné­ro­sité de leurs modu­la­tions. Le JP-4 n’échappe pas à la règle. L’unique LFO possède 4 formes d’onde (sinus, carré, rampe posi­tive, rampe néga­tive) et une vitesse mémo­ri­sable (0,1 à 80 Hz). On peut aussi mémo­ri­ser sa quan­tité de modu­la­tion sur le pitch (curseur), le PWM (sélec­teur 4 posi­tions) et le filtre (curseur). Il possède égale­ment des réglages non mémo­ri­sables : délai (0 à 10 s), ajus­te­ment de vitesse et gamme de vitesse : la posi­tion Wide lui permet d’at­teindre le Nirvana du LFO : l’au­dio. On peut aussi passer par la section de modu­la­tion temps réel et ainsi assi­gner le bâton de joie à l’ac­tion du LFO sur la fréquence du VCO, le VCF et le VCA. D’ailleurs, ledit bâton peut aussi modu­ler direc­te­ment le pitch, le filtre et le volume ; la confi­gu­ra­tion est au choix pour chaque module de desti­na­tion, un poten­tio­mètre permet­tant d’ajus­ter, dans les deux cas, la modu­la­tion. C’est dans la même zone géogra­phique que l’on règle le porta­mento poly­pho­nique (marche/arrêt et temps) et l’oc­tave (0 ou –1).

Côté enve­loppes, on trouve une ADSR sur le filtre (avec inver­seur de pola­rité) et une ADSR sur le volume. Elles peuvent se monter très claquantes : attaque de 0,6 ms à 3 s (un peu courte), déclin et relâ­che­ment de 14 ms à 10 s. Les réglages des enve­loppes sont évidem­ment mémo­ri­sés. Dommage tout de même qu’on ne puisse les assi­gner à autre chose que leurs desti­na­tions fixes, en parti­cu­lier la fréquence du VCO. Retour­nons sur le panneau supé­rieur, dans la section Trig­ger. On y trouve un géné­ra­teur S&H issu du géné­ra­teur de bruit ; il permet de modu­ler le VCF avec une quan­tité dosable et une vitesse assi­gnée à l’hor­loge interne ou un signal externe. Sympa ! Enfin, le JP-4 possède un petit arpé­gia­teur à 4 motifs (haut, bas, alterné, aléa­toire) fonc­tion­nant toujours sur 4 octaves, avec réglage de tempo et d’hor­loge (interne ou externe). On peut l’uti­li­ser en mode poly­pho­nique (accord égrené puis trans­posé sur 4 octaves) ou unis­son (note trans­po­sée sur 4 octaves). Voilà, on peut aller à Rio !

Don’t You Want Me ?

Au final, le JP-4 est un synthé très singu­lier. Ses possi­bi­li­tés de synthèse et de modu­la­tion sont très réduites, tout comme sa poly­pho­nie (bon, c’était il y a plus de 40 ans !). Il n’est pas des plus géné­reux sur le plan de la connec­tique et ne se laisse pas pilo­ter faci­le­ment, à moins d’ins­tal­ler des entrées CV/Gate ou un kit MIDI. Alors pourquoi est-il autant recher­ché aujour­d’hui, parfois même préféré au JP-8 ? Avant tout pour le son : gras, gros, brut, direct, avec un carac­tère typique­ment seven­ties. Cela est dû à un VCO riche, un filtre d’une musi­ca­lité magni­fique, des enve­loppes ultra­ra­pides, un LFO flir­tant bon l’au­dio, un mode unis­son dévas­ta­teur et un effet ensemble magique. Sans oublier les mémoires, un luxe à l’époque ! Bref, un grain inimi­table couplé à une prise en main rela­ti­ve­ment aisée pour celui qui sait faire des réglages précis, sans équi­valent ou modé­li­sa­tion accep­table à ce jour…

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8/10
Points forts
  • Caractère sonore pur seventies
  • Prise en main immédiate
  • Gros oscillateur avec Sub
  • Filtre résonant très musical
  • Patate des enveloppes
  • Mode unisson dévastateur
  • LFO très rapide
  • Arpégiateur intégré
  • Effet d’ensemble exquis
  • Mémoires de programmes
  • Qualité de construction
Points faibles
  • Polyphonie limitée
  • Un seul oscillateur par voix
  • Pas de filtre multimode
  • Pas d’Autotune
  • Mémoires réduites et non éditables
  • Clavier statique assez moyen
  • Pas d’entrée audio vers le filtre
Auteur de l'article synthwalker Passionné de synthés, concepteur produits et rédacteur presse

J'aime tous les synthés, avec une préférence pour les poly vintage à mémoires, qui m'accompagnent depuis le début des 80's. J'écris depuis 25 ans sur les synthés et j'ai contribué au développement de certains d'entre eux. Plusieurs centaines de mes articles ont été publiés sur Audiofanzine et auparavant dans les magazines PlayRecord, Recording, Keyboards, Musicsound et Musiciens.


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J'aime tous les synthés, avec une préférence pour les poly vintage à mémoires, qui m'accompagnent depuis le début des 80's. J'écris depuis 25 ans sur les synthés et j'ai contribué au développement de certains d'entre eux. Plusieurs centaines de mes articles ont été publiés sur Audiofanzine et auparavant dans les magazines PlayRecord, Recording, Keyboards, Musicsound et Musiciens.