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Condensateurs en Lewittation
8/10
Award Qualité / Prix 2022
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Innovants dans l’univers du microphone, Lewitt nous propose une paire stéréo bon marché, et deux sons distincts pour un même modèle. Les LCT 140 Air, micros à condensateurs, sont-ils une option intéressante pour les petits budgets ? Éléments de réponse…

Test des micros Lewitt LCT 140 Air : Condensateurs en Lewittation

lewitt_etui_house.JPGLewitt, très jeune marque puisque fondée en 2009, se distingue par un posi­tion­ne­ment sur l’in­no­va­tion tech­no­lo­gique dans le monde des micros. C’est un sujet dont on entend souvent parler, le manque d’au­dace dans l’offre micro­phone, le fait que les construc­teurs se réfèrent encore la plupart du temps à des modèles vieux d’un demi-siècle ou plus. Et comme nous aussi, on aime nos vieux clas­siques, on est plutôt sensible à cette démarche conser­va­trice, on rechigne un peu à aller voir du côté de la nouveauté. Ce test est donc une bonne occa­sion de nous y confron­ter et de nous inté­res­ser de plus près à la démarche de Lewitt. La marque d’ori­gine autri­chienne (l’Au­triche est une terre de micros, déci­dé­ment) est spécia­li­sée dans le micro­phone, mais ratisse large dans ce domaine : de nombreux modèles à desti­na­tion des studios d’en­re­gis­tre­ment, de la scène, des radios-télé­vi­sions ou encore confé­ren­ces… Leur crédo, c’est de « faire évoluer le statu quo en matière de concep­tions de micro­phones ».

Légers comme l’air

lewitt_etui_close_2.JPGLes LCT 140 Air sont des micros à conden­sa­teurs, petites membranes à direc­ti­vité cardioïde. Ils sont desti­nés à de multiples usages, soit en paire stéréo, soit à l’unité, mais le construc­teur nous les recom­mande parti­cu­liè­re­ment pour les batte­ries en overhead et pour les guitares acous­tiques. La série LCT à laquelle appar­tient ce modèle, qui propose un large choix de micros à conden­sa­teurs, pour une gamme de prix tout aussi large, va de 040 à 1040. La paire de 140 nous est livrée avec quelques acces­soires : évidem­ment des pinces, qui nous semblent plutôt solides et bien faites, des bonnettes anti-vent et une petite housse de trans­port. La première chose qui nous frappe, c’est que les micros sont hyper­lé­gers ! 66 grammes chacun. Les pinces, pour­tant pas très impres­sion­nantes, sont nette­ment plus lourdes que les micro­phones, pour vous donner une idée. Pour un usage d’ove­rhead ou ambiances sur une perche, c’est plutôt pratique et cela permet­tra d’étendre une perche — même sur un pied de piètre qualité — sans s’inquié­ter pour la stabi­lité ou la soli­dité de l’en­semble. La marque nous précise que ce poids est dû à des boîtiers en alumi­nium, qui restent très résis­tants. On ne les a pas utili­sés assez long­temps pour pouvoir en témoi­gner, mais si la légè­reté n’est pas syno­nyme de fragi­lité, on valide assu­ré­ment. Le LCT 140 Air est assez clas­sique dans son allure, de type micro cigare, même si le logo Lewitt vert un peu flashy se distingue.

lewitt_solo_zoom.JPGSurtout, on remarque trois inter­rup­teurs : le PAD qui permet d’at­té­nuer de 12 dB, le Filtre qui est un coupe-bas à 80 Hz (atté­nua­tion de 12 dB par octave), et surtout le « Sound ». On touche ici à ce qui fait une des grandes spéci­fi­ci­tés de ce micro, et qui lui donne son nom « Air », car cet inter­rup­teur nous permet de choi­sir entre une réponse en fréquence linéaire « Flat » et ce son « aéré » qui consiste en une bosse très franche dans les fréquences aiguës. C’est une carac­té­ris­tique — ou un argu­ment de vente — que l’on retrouve dans d’autres produits sortis récem­ment, cette volonté des marques de propo­ser deux usages, ici deux signa­tures sonores, pour un seul produit. De notre point de vue, c’est évidem­ment inté­res­sant, et on va se faire un plai­sir de tester ces deux sons et de les compa­rer, les confron­ter à d’autres modèles qu’on connaît bien. Pour complé­ter le tableau, il est impor­tant de préci­ser que c’est une paire parti­cu­liè­re­ment bon marché : 299 € direc­te­ment sur le site de la marque, encore moins cher chez certaines boutiques en ligne.

Overheads Air Max

lewitt_stereopair_drum.JPGOn se lance donc dans un test gran­deur nature. Quoi de mieux pour tester des overheads que de faire des petites prises de batte­rie. On a notre kit Asba qui est déjà équipé en micros et on place notre paire de Lewitt à un mètre cinquante au-dessus de la grosse caisse, en formant un couple XY (le place­ment de celui-ci a été corrigé après les photos). Comme d’ha­bi­tude, et pour mieux se rendre compte du son des micros, on décide de n’ap­pliquer aucune correc­tion ni proces­seur de dyna­mique sur nos pistes. Une batte­rie en neuf lignes qui rentrent toutes dans notre console Amek, et dont on va juste corri­ger les phases, et donner un peu de laté­ra­li­sa­tion et d’ou­ver­ture dans la stéréo.

Dès la première écoute, on est assez séduit par ce qu’on entend, il y a du bas, de l’im­pact, un joli spectre harmo­nique et une belle défi­ni­tion dans le haut du spectre. On prend alors le parti de les compa­rer avec trois autres paires de micros statiques récents et non à nos vieux Neumann, parce que la marque insiste sur le fait qu’ils se carac­té­risent par leur inno­va­tion et leur moder­nité. On choi­sit les Rode NT5, parce que c’est exac­te­ment la même gamme de prix, et que c’est un petit diaphragme, les Oktava MK 012, à peine plus chers et petites membranes égale­ment, et une réfé­rence un peu plus onéreuse en la présence des AKG C414 XLS, qui sont eux à larges membranes, mais se carac­té­risent par un son moderne et plutôt brillant. Pour le test batte­rie, on décide de lais­ser le bas du spectre vivre et de ne pas enclen­cher le filtre coupe bas. Le résul­tat est très inté­res­sant, le son du couple en solo est plein et équi­li­bré, très percus­sif, et les tran­si­toires sont parti­cu­liè­re­ment précises sans pour autant être agres­sives ni sonner arti­fi­cielles. On se dit alors qu’en partant de cette base très équi­li­brée, il nous manque juste un peu de substance dans le bas des fûts pour avoir un son complet et prêt à être mixé.

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Quand on les intègre au reste de la prise en ouvrant les micros de proxi­mité, notre première impres­sion se confirme. L’image sonore est bien nerveuse comme on les aime et la stéréo est parfai­te­ment repré­sen­tée, notam­ment grâce à une très belle couleur dans le haut des médiums qui va donner un côté rebon­dis­sant aux attaques de la batte­rie. Notre paire de Lewitt s’in­tègre parfai­te­ment en donnant la juste dose de distance, de brillance, d’ou­ver­ture tant spatiale qu’har­mo­nique, et surtout des tran­si­toires saillants et pleins de carac­tère. Le spectre de fréquence est en revanche très dégagé d’un bas médium et d’un grave qui pour­raient être inté­res­sants. Mais ces mêmes fréquences peuvent aussi inter­fé­rer avec les micros de proxi­mité et accen­tuer certains phéno­mènes de phase, à l’image du conflit qu’on pourra avoir avec les C414 qui sont beau­coup plus char­gés dans ces fréquences du fait de leur large diaphragme.

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On veut tout de suite essayer le mode Air de nos LCT 140, que la marque met parti­cu­liè­re­ment en avant. La confi­gu­ra­tion de la batte­rie est la même, rien ne change hormis ce petit commu­ta­teur qui, comme le montre le graphique fourni par Lewitt, confère une grosse augmen­ta­tion de plus ou moins 5 dB sur une bande de fréquence située entre 5 et 15 kHz. On est d’ailleurs un peu éton­nés que leur air ne soit pas consti­tué d’ai­gus plus hauts et notam­ment de 15 à 20 kHz, qui est souvent la bande de fréquence qu’on va augmen­ter quand on veut donner de l’air au mixage. Mais nous n’en sommes pas là, il s’agit pour l’ins­tant d’en­re­gis­tre­ment.

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En solo, on se dit qu’ils y sont allés un peu fort sur l’ef­fet recher­ché, cinq déci­bels sur une plage si large, c’est tout de même assez impor­tant comme chan­ge­ment. Mais comme ce n’est pas un étage qui ouvri­rait tout le haut du spectre, mais unique­ment une plage défi­nie de hautes fréquences, les plus aiguës ne sont pas beau­coup augmen­tées et ne nous dérangent pas, alors que les fréquences concer­nées rapportent encore un supplé­ment de nervo­sité, et révèlent certains détails de cymbales ou de char­les­ton. On trouve tout de même que la bosse est un peu exces­sive entre 10 et 15 kHz. Elle nous révèle quelques arte­facts et compo­santes de l’en­ve­loppe qui ne sont pas tota­le­ment néces­saires à nos oreilles (mais ça reste une ques­tion de goût).

À gauche le graphique repré­sente l’ana­lyse du spectre d’un overhead en mode Flat, et à droite en mode Air.

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On est clai­re­ment à l’op­posé des Oktava MK012 qui sont vrai­ment très pauvres dans cette bande de fréquence, mais para­doxa­le­ment très char­gés en grave et en bas médium. Quand on l’in­tègre au reste des sources, l’im­pres­sion s’at­té­nue et on retrouve quelque chose de plus nerveux, mais aussi encore plus moderne que la posi­tion Flat. On se rapproche fina­le­ment plus de la couleur des Rhodes NT5, mais avec un haut médium et des aigus beau­coup plus contrô­lés et musi­caux, et des tran­si­toires éminem­ment plus subtiles et natu­relles.

Sur la guitare, des attaques qui vont Witt

4micros_ gtr2.JPGLe construc­teur mentionne un autre usage recom­mandé pour l’uti­li­sa­tion de ces micros, et c’est une autre de nos acti­vi­tés favo­rites au studio, en l’oc­cur­rence les prises de guitare acous­tique. Cela va nous permettre d’es­sayer le micro tout seul, sorti de son utili­sa­tion en paire stéréo, ce qui révèle souvent un autre carac­tère. On repro­duit le même mode opéra­toire, sauf que cette fois, on peut carré­ment le faire en une seule prise, avec les quatre micros bien alignés devant, à plus ou moins 30 cm de la guitare comme le préco­nise Lewitt. On va être obli­gés de tricher un petit peu parce que les MK 012 ont un gain plus faible que les autres, alors utili­sera le trim de notre DAW pour remettre le signal d’aplomb.

La première chose qui nous plait, c’est que le son est assez natu­rel­le­ment débar­rassé du côté un peu boueux que peuvent avoir les prises de guitare acous­tique quand elles ne sont pas corri­gées. L’ef­fet de pompe dans le bas du spectre qui vient des coups de média­tor de la ryth­mique est parti­cu­liè­re­ment repré­senté dans les prises du C414 et du MK012. On a l’im­pres­sion que la piste du LCT 140 pour­rait se placer natu­rel­le­ment dans un mix sans être « nettoyée » de ce surplus de grave. On adopte parfois une distance un peu plus impor­tante entre la source et le micro pour palier à cet effet quand on enre­gistre des guitares acous­tiques avec des micros statiques large membrane de haute-fidé­lité. 

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Le deuxième point qui nous saute aux oreilles, ce sont les coups de média­tor sur les cordes, le « strum » comme ils disent outre-Atlan­tique. En règle géné­rale, il se situe dans le spectre harmo­nique entre 3.5 et 12 kHz, en fonc­tion de la guitare, des cordes et du guita­riste, mais il est souvent assez déséqui­li­bré et on va avoir tendance à vouloir creu­ser certaines fréquences qui seraient trop présentes. En l’oc­cur­rence, on aurait tendance à aller nettoyer autour de 7 kHz dans la prise du Rode. Encore une fois, celle du Lewitt est très équi­li­brée et les hautes fréquences sont natu­relles et douces, malgré leur réac­ti­vité et leur nervo­sité. Il y a une très belle densité entre 2 et 3 kHz, qui va situer le bas de l’at­taque dans cette plage de fréquence, et ainsi donner une assise confor­table et très agréable.

On a main­te­nant envie de tester les petites options, et on enclenche donc de nouveau le mode Air. Cela nous parait encore une fois un peu exces­sif dans le haut (très haut) du spectre, parce que ça vient rele­ver les arte­facts du jeu, et aussi placer la bande de fréquences que consti­tuent les attaques et les bruits de doigts plus haut et renfor­cer ces compo­santes. C’est encore une fois une ques­tion de goûts, mais on préfère quand ces fréquences sont conte­nues et maitri­sées, même si ça pour­rait parfai­te­ment conve­nir si on voulait doubler une ryth­mique de guitare élec­trique, pour rajou­ter surtout de l’at­taque et venir enri­chir le haut du spectre, mais c’est une histoire de produc­tion, à ce compte-là. 

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On finit par tester le filtre coupe-bas, qui est censé agir à 80 Hz, mais qui en fait remonte beau­coup plus haut et adopte une pente plutôt douce et musi­cale. On a alors consi­dé­ra­ble­ment allégé le bas du spectre, de telle sorte qu’on se retrouve avec un son plutôt médium et presque un peu aigre, mais qui reste pour autant très musi­cal et chaleu­reux. Il pour­rait sans trop de diffi­culté se combi­ner en doublage stéréo avec une autre guitare, sans appor­ter trop de pâte harmo­nique ni être enva­his­sant. C’est exac­te­ment ce qu’on attend d’un filtre coupe-bas sur un micro, un résul­tat marqué, mais qui reste équi­li­bré et musi­cal.

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Conclu­sion

Pour ce prix-là, les LCT 140 Air sont de sérieux concur­rents ! Les aigus sont beaux, les tran­si­toires rapides et natu­relles, leur légè­reté permet de les placer faci­le­ment. On manque peut-être un peu de bas et de bas médium pour qu’ils soient encore plus poly­va­lents, mais pour un budget aussi modeste, on ne peut pas trop en deman­der. Le son « Air » est un peu exces­sif à notre goût, mais certains le trou­ve­ront sans doute utile, et pour nous la qualité et l’équi­libre du son en posi­tion « Flat » justi­fient ample­ment le choix de cette paire.

8/10
Award Qualité / Prix 2022
Fabrication (?) : Chine
Points forts
  • Une réponse en fréquence globalement linéaire
  • La musicalité du son
  • Des aigus et haut médiums très beaux
  • Des transitoires naturelles
  • Une légèreté impressionnante
  • Le prix très raisonnable !
Points faibles
  • Un "Air" un peu excessif
  • Léger manque de bas dans la réponse en fréquence
Auteur de l'article Studios Megaphone

Les Studios Mégaphone, c'est un ensemble de studios de création, enregistrement et production musicale... situé à Aubervilliers juste au nord de Paris. Dimitri et Manuel sont les deux techniciens son et musiciens qui font tourner le studio principal.


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