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Napator32 Napator32

« La claque »

Publié le 15/12/20 à 12:10
Rapport qualité/prix : Excellent
Cible : Les utilisateurs avertis
La claque.

J’ai toujours apprécié la pâte Dreadbox, ces gros sons ronds sans chichi noyables dans un océan de tristesse luisante, et cela faisait longtemps que je reluquais les différents Erebus et autres Nyx sans sauter le pas.
Et puis le Typhon est sorti, et la perspective de pouvoir le trimballer sans clavier grâce à son petit séquenceur et sa mémoire a achevé de me convaincre pour un prix des plus attractifs.
À moi donc les leads bien glauques, des sons sous-marins, des trucs un peu acid mais sombres très synthwave avec ce petit synthé analo à 2 VCO détunables sur 2 octaves, plus filtre analo bien cool, plus mémoire, plus effets et audio in, plus séquenceur, transportable grâce à son alim USB et sa prise casque (2 sorties stéréo donc)

On a donc bien sûr un module sonore à mémoire qui peut servir au bout d’un clavier ou d’un séquenceur externe. On travaille ses sons sur le canapé, et on les mémorise pour pouvoir les jouer plus tard . Il peut servir aussi de module autonome grâce au séquenceur intégré. Très bien pour écrire une petite ligne de basse au coin du feu, qu’on intègrera telle quelle dans son set, et tripotable à l’envi dans le feu de l’action. Mais ce que je n’avais pas prévu, c’est l’utilisation comme module d’effet. J’y ai branché ma guitare par la sortie casque de l’ampli (pour faire office de DI), et là, c’est la claque. Les effets embarqués sont par eux même très interessants, mais ce qui change complètement la donne tient à l’architecture même de la machine.
Je ne vais donc pas parler du synté en lui même, de ses VCO et VCA, de ses enveloppes, de son filtre.D’autres le feront mieux que moi. Je ne vais pas non plus m’attarder sur les effets en eux même, pour les mêmes raisons.
Je vais me contenter de décrire mon usage, le workflow, en tant que boîte à effets, midifiée et à mémoire ! On pourra en déduire la puissance du bouzin en tant que boîte à effet capable de creer de tout : Slicer, tremolo, enveloppe folower, chorus, flanger, distos, reverb, delays, ring mod...

Premier pas : ouvrir l’audio in.
Nous avons l’entrée audio in qui s’ouvre lorsque une note est jouée, et donc sur les pas actifs du séquenceur. Pour l’utiliser comme module d’effet sans déclenchement externe (appuyer sur une touche d’un clavier par exemple), il faut lancer le séquenceur. Bonne nouvelle, le séquenceur ne s’arrête pas quand on change de préset, et on change de preset directement quand on appuie sur la confirmation du changement, sans attendre la fin de la boucle. On pourra donc passer d’un effet custom mémorisé à un autre directement sans trop de manipulation : on sélectionne le nom du preset suivant ( pendant que le preset précédant continue de tourner), on valide et hop, on l’a directement sans coupure. Autre bonne nouvelle, induite, après avoir bien trituré le son d’origine, et cela vaut aussi pour le reste des réglages du synthé, séquenceur inclu, on peut instantanément y revenir en le rechargeant. Au top pour le live.

Deuxième pas : rendre silencieux les VCO pour n’avoir que l’effet.
En haut de l’écran principal on a les 7 onglets : Modulation 1, Mod 2, Mod3, FX1, FX2, FX3, Set. Le potard principal (cranté, un peu rude) permet de se déplacer de l’un à l’autre, ce qui change le bas de l’écran en faisant apparaître les réglages actifs des faders pour l’onglet considéré.
Pour l’utiliser comme effet, il faut mettre les VCO à zéro dans l’onglet Set où un fader permet de le faire. On peut bien sûr le mémoriser ainsi avec le preset, mais si ce n’est pas le cas on peut très rapidement les baisser sans avoir à trop trifouiller dans les profondeurs d’un menu : on tourne la molette sur Set, et on baisse le fader des VCO.
Bonne nouvelle, quand on change de preset, on ne change pas l’onglet actif. Si je tripatouille par exemple le FX1 et que je change de preset, l’onglet actif restera sur FX1. Encore une fois : parfait pour le live. Pour ce qui est de muter les VCO, si on charge un preset où on a des VCO actifs, on peut donc très rapidement mettre les VCO du nouveau preset à zéro : on se met sur l’onglet Set au préalable, la main sur le bon fader, et quand on charge le nouveau preset on le baisse. Rapide. Autre chose appréciable, la molette fais tourner en cercle de M1 M2 M3 Fx1 Fx2 Fx3 Set et de ce dernier à M1 et ainsi de suite. Si je n’ai pas anticipé en me mettant sur l’onglet Set, et si je suis en M1 je peux donc aller plus rapidement à Set en tournant la molette vers la gauche. Dommage que cela ne soit pas le cas pour naviguer dans les presets : arrivé à la fin de la banque il faut repasser tous les presets en marche arrière pour revenir au début (je suis en OS 1.1, peut-être que sur le dernier OS ce n’est pas le cas).
Cette architecture très « en surface » du contrôle des paramètres permet de remédier très rapidement aux éventuels couacs, ce qui est hautement appréciable en live.

Troisième pas : ajuster le temps d’ouverture par pas de l’audio in.
Dans le sequenceur, le controle gate de chaque pas permet d’aller de Rest (rien n’est joué) à Tie, où tout le pas est ouvert. Donc sur Rest, pas de son sur ce pas, si tous les pas sont sur Tie ils présentent une suite totalement ouverte à l’audio in, et entre les deux seul un pourcentage de durée du pas est ouvert. À ce stade, on voit qu’on peut faire un slicer très puissant. Si on veut une ouverture totale à l’audio in, on met tous les pas sur TIE, ou, plus efficace, on règle la longueur du séquenceur sur un seul pas.
Pour revenir au séquenceur en général, on peut modifier à la volée le nombre de pas de la séquence, ainsi que sa signature rythmique c’est à dire le nombre de divisions pour une bar donnée (en plus du tempo Bpm)...on a donc un diviseur/multiplieur de clock assez puissant et direct. Si ma séquence tourne en 8/8, je peux changer pour une boucle de 5 pas par exemple, et en 4/4, le tout à 120bpm. On entre dans la polymétrie avec les autres machines..Je peux revenir au 8/8 sur 8 pas instantanément grâce aux faders (ou en rechargeant la séquence). C’est donc un outil génial pour le live. Une probabilité globale (non par pas) de déclenchement des pas peut aussi être appliquée...La dynamique peut être paramétrée par pas pour une première forme de tremolo custom (nous en aurons d’autres, notamment en affectant une modulation au VCA ou encore au filtre pour un effet « harmonic tremolo », mais ne nous avançons pas)

Voilà donc pour la gestion de l’entrée audio in.

Quatrième pas : les effets en eux même.
Que l’audio in soit avant le filtre permet bien entendu d’en tirer avantage, d’utiliser la résonance et l’enveloppe du VCA...Je n’ai pas bien vu si un pédalier midi externe peut contrôler ces paramètres, mais si oui, on peut avoir une Wahwah de tonerre. Nous avons ensuite 3 familles d’effets cumulables en série. Chaque onglet d’effet a entre autre, son fader de MIX qui permet d’en contrôler le volume ou niveau de l’effet. Pour désarmer l’effet, il faut le mettre à zéro (pas de on/off), et comme on peut avoir aussi des valeurs négatives il faut parfois avoir à viser juste avec le fader...Rien d’insurmontable cependant.
Les effets sont assez interessants, avec beaucoup de paramètres pour chacun d’eux. Spécial coup de coeur pour le chorus qui m’a permis de retrouver l’effet détuné d’une Zvex instant lo-fi. La reverb a un prédelay qui peut être assez long pour du slapback, les delays sont bien foutus et synchronisables sur la clock...il y aurait beaucoup à dire pour chacun d’eux mais on va s’en tenir au workflow et à l’architecture de la machine, ce qui nous amène aux modulations.

Cinquième pas : de la modulation baby.

Là où ça devient une tuerie, c’est l’architecture des modulations. Il y a 3 modulations. On peut les déclencher en même temps. Elles sont déclenchées sur les pas du séquenceur ou en mode libre. Plusieurs formes de modulations sont possibles : LFO, enveloppe, random ou un séquenceur parallèle. Chacune peut avoir différentes formes. Par exemple pour le LFO : sine, square...
On a aussi un paramètre de fade qui permet d’agir sur le sustain de la modulation. On a donc un outil très puissant.
Ce qui tue, c’est qu’on peut affecter simultanément une modulation à plusieurs destinations. En bougeant le fader des destinations, on voit le ratio de la modulation alloué à chaque destination. Ainsi je peux choisir pour M1 un certain LFO qui modifie le Cut off du filtre et le delay. Simultanément, la modulation 2 réglée différemment peut aussi affecter les mêmes destinations mais à sa manière. On peut donc avoir jusqu’à 3 modulations différentes et simultanées affectant une même destination. Imaginez trois LFO aux rates ou formes différents affectant par exemple la résonance ou le cutoff du filtre et se superposant ; à la fin on a créé une modulation complètement custom pour la résonance ou le cutoff. Et chaque modulation, comme nous l’avons dit, peut être affectée à plusieurs paramètres en même temps. Monstrueux. Imaginez les effets de multitremolo, de phase, de ring mod evolutif...
Par moment j’ai l’impression de posséder une pédale Glouglou.
Au niveau du workflow, une fois un preset chargé et si on veut voir comment les modulations sont paramétrées, il faut aller dans chacun des onglets de modulation, repasser chacune des destinations avec le fader pour voir là où le niveau de la modulation pour une destination donnée n’est pas à zéro. On ne peut donc pas globalement mettre la modulation à zéro ; il faut la mettre à zéro pour chacune des destinations. Ça c’est moins bien pour le live, même si c’est vite fait avec la pratique : on se positionne sur l’onglet d’une des trois modulations, on balaye les destinations avec le fader pour repérer les destinations actives, et on les met chacune à zéro avec le fader LVL qui est juste à côté. C’est là où on apprécie d’avoir de la mémoire, la construction/déconstruction des modulations étant un peu moins directe.

Ceci étant digéré, libre à nous de remettre les VCO...on a donc par exemple comme une backing track synthé sur laquelle jouer (bien évidemment avec les limitations que suppose le fait de passer par le même séquenceur/ filtre/section d’effets et modulations). Certains présets d’usine sont très bon directement comme boîte à effet, d’autres pas du tout. Prenons « Rumble » par exemple. On met les VCO à zéro, la guitare dans l’audio in, on lance le séquenceur et on le retouche un peu, et hop, c’est parti pour du gras... on pourra jouer sur le cut off, la résonance, les paramètres de l’effet 1...monstrueux. Puis on pourra réintroduire les VCO pour une ligne de basse servant de backing track. Bref, beaucoup de fun, surtout si on y adjoint une petite boîte à rythme, pour un encombrement des plus minimaux. Il me restera à explorer bien d’autres petits trucs plus ou moins sales, comme relier la sortie casque à l’audio in pour voir si ça crame :mrg:, utiliser les CC’s, jouer de la transposition des séquences avec le truchement d’un séquenceur externe et voir si je peux réinjecter le résultat en midi dans un autre séquenceur...très inspirant.

Conclusion : C’est une machine qui a fait le pari du compromis et de la simplicité (pas de matrice pour les formes d’ondes des VCO, ADSR par valeurs prédéfinies, pas de on/off dans les menus etc.) et qui pourtant est d’une polyvalence incroyable pouvant s’intégrer dans beaucoup de contexte de production musicale. Au delà du son en lui même, son architecture la transcende pour en faire une machine très attachante sachant être couteau suisse sans perdre de son caractère. Je pense que ce Typhon va me suivre longtemps.