Se connecter
Se connecter

ou
Créer un compte

ou
Pédago
11 réactions

Le confort du chanteur (3e partie)

Le guide de l’enregistrement - 95e partie

Troisième et dernier volet de notre chapitre consacré au confort du chanteur lors des prises de voix. Aujourd'hui, nous allons nous pencher pour la première fois sur le cas du matériel utilisé. Toutefois, avant d'aborder concrètement la question du "matos" sous un angle purement technique, il convient en premier lieu de s'attarder sur son aspect pratique du point de vue de l'interprète afin de lui permettre de donner le meilleur de lui-même…

Le confort du chanteur (3e partie) : Le guide de l’enregistrement - 95e partie
Accéder à un autre article de la série...

Sing, not Sing Sing

Comme je vous le répète depuis quelques semaines, il est primor­dial que votre chan­teur se sente à l’aise lors de vos séances d’en­re­gis­tre­ment. Or, les appren­tis ingé­nieurs du son ont bien souvent une fâcheuse tendance à impo­ser des contraintes tech­niques aux musi­ciens du genre « mets-toi là, joue par là et surtout ne bouge pas trop »… Ce type de consigne part bien sûr d’un bon senti­ment dans l’op­tique d’op­ti­mi­ser la capta­tion d’un point de vue stric­te­ment tech­nique, mais pour un musi­cien plus ou moins étran­ger au monde du studio, cela peut faci­le­ment passer pour le règle­ment inté­rieur d’une prison. Avouez que ce n’est pas vrai­ment l’idéal pour qu’un artiste puisse expri­mer tout son poten­tiel, n’est-ce pas ? Ce constat est vrai pour tous les musi­ciens mais il l’est encore plus dans le cas du chan­teur pour diverses raisons que nous avons déjà évoquées à maintes reprises depuis le début de ce chapitre consa­cré à l’en­re­gis­tre­ment de la voix. Mora­lité, faites en sorte que les condi­tions tech­niques ne deviennent pas des contraintes pour votre inter­prète ! Tout ce beau discours vous semble peut-être beau­coup trop abstrait. Voyons donc un cas concret de façon à éclair­cir mon propos. 

Prenons par exemple le cas du micro chant. Dans l’idéal, vous avez votre chan­teur bien sage­ment planté devant un pied de micro équipé d’un statique large membrane et d’un filtre anti-pop. Sauf que dans la vraie vie, certains artistes préfèrent avoir le micro en main, ou bien encore d’autres ont la bougeotte, etc. Que faire alors ? Eh bien à mon humble avis, plutôt que de les brider, mieux vaut les lais­ser s’ex­pri­mer comme ils ont l’ha­bi­tude de le faire et brico­ler une solu­tion tech­nique qui rendra les prises exploi­tables vaille que vaille. Pour être encore plus clair, lais­sez-moi vous racon­ter deux expé­riences person­nelles.

Enregistrement-95Il y a quelques années de cela, j’ai travaillé avec un jeune rappeur. Comme souvent chez les rappeurs, ce dernier avait pour habi­tude de tenir son micro à la main en le collant litté­ra­le­ment à sa bouche, ce qui est loin d’être idéal… J’ai donc dans un premier temps essayé de capter son flot de façon « tradi­tion­nelle » mais sa voix était alors d’une plati­tude infi­nie alors qu’en live elle flirte avec la nervo­sité d’un Eminem à la grande époque. Bien entendu, impos­sible de lui faire tenir un élec­tro­sta­tique à la main tant ce type de micro est sensible aux mani­pu­la­tions. Du coup, je lui ai collé dans les mimines un bon vieux sm58 pour qu’il s’ex­prime comme à son habi­tude et j’ai doublé la prise grâce à un C414 en mode omni­di­rec­tion­nel placé à envi­ron 1,50 m de lui. En combi­nant ces deux prises et en compres­sant bien le tout, j’ai obtenu exac­te­ment ce qu’il nous fallait pour le titre en cours de produc­tion : de la présence, de l’air et surtout de l’ex­pres­si­vité ! Certes, tech­nique­ment parlant le rendu écouté en solo est clai­re­ment discu­table. Cepen­dant, logé au coeur du mix, cela fonc­tionne à merveille. Que deman­der de plus ?

Dans le même ordre d’idée, je me suis retrouvé un jour à faire des prises avec une chan­teuse qui bougeait fréquem­ment la tête à droite ou à gauche lorsqu’elle donnait de la voix. Or, comme le lieu de capta­tion était pour le moins étriqué avec en sus une acous­tique pour le moins discu­table, il m’était impos­sible d’éloi­gner le micro afin de moins subir l’im­pact fréquen­tiel de ces nombreux dode­li­ne­ments intem­pes­tifs… Du coup, j’ai eu l’idée de travailler avec trois micros iden­tiques placés en arc de cercle à proxi­mité de la tête de l’ar­tiste. De plus, j’ai pris la peine de filmer les diffé­rentes prises avec mon télé­phone portable placé sur un trépied. Ainsi, lors de la phase d’édi­tion, j’ai commencé par synchro­ni­ser la vidéo aux diffé­rentes prises puis j’ai édité les prises en sélec­tion­nant pour chaque phrase le micro vers lequel sa tête était diri­gée. Résul­tat des courses, le comping final est tout simple­ment bluf­fant, jamais on ne croi­rait qu’il provient d’une session d’en­re­gis­tre­ment aussi tara­bis­co­tée !

Voilà, j’es­père qu’au travers de ces exemples vous aurez compris qu’il faut savoir faire preuve d’ima­gi­na­tion afin de faci­li­ter la vie de l’in­ter­prète et ainsi obte­nir « La Prise ». Après tout, une grande partie du travail de l’ingé-son ne se résume-t-elle pas à élabo­rer des solu­tions tech­niques au service de l’ar­tis­tique ? Person­nel­le­ment, j’en suis inti­me­ment convaincu.

Sur ce, rendez-vous la semaine prochaine pour de nouvelles aven­tures !

← Article précédent dans la série :
Le confort du chanteur (2e partie)
Article suivant dans la série :
Le retour pour le chanteur (1re partie) →

Vous souhaitez réagir à cet article ?

Se connecter
Devenir membre