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Hong Kong Star
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Award Innovation 2020
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Il y a quelques mois, l’Hydrasynth crée la surprise : est-ce son constructeur jusqu’alors inconnu, son clavier à pression polyphonique, son interface utilisateur innovante ou sa qualité sonore ? Sans doute un peu de tout cela à la fois…

Test de l'Hydrasynth d'Ashun Sound Machines : Hong Kong Star

La jeune société Ashun Sound Machines (ASM) est la propriété du groupe Medeli, facteur hong­kon­gais d’ins­tru­ments de musique élec­tro­nique depuis 1983. Elle est prési­dée par Fanny Cheng, le déve­lop­pe­ment produit est entre les mains de Glen Darcey (ancien de chez Roland, Akai et Artu­ria) et les ventes placées sous la direc­tion de Daniel Troberg (ancien de chez Elek­tron). Il est rare de nos jours qu’une entre­prise appa­raisse d’un seul coup dans le milieu de la synthèse avec une première offre très abou­tie.

ASM est pour­tant bien un nouvel entrant sur le segment du synthé, après deux années de R&D concen­trées sur son premier produit, ou plutôt ses premiers produits : la série Hydra­synth. Il aura aussi fallu plusieurs mois à ASM pour orga­ni­ser sa distri­bu­tion en Europe. Nous remer­cions vive­ment Steve Baltes de Sonic Sales, impor­ta­teur de la marque pour l’Al­le­magne, l’Au­triche, le Bene­lux, la Suisse et la France, de nous avoir envoyé l’un de ses premiers modèles dispo­nibles. Il nous a installé le dernier OS à jour (1.31) et une banque sonore addi­tion­nelle (Inhalt). C’est donc avec curio­sité et délec­ta­tion que nous avons déballé, installé et bran­ché un magni­fique Hydra­synth clavier…

Beau parti

Hydrasynth_2tof 01.JPGL’Hy­dra­synth est d’em­blée dispo­nible en deux modèles : clavier (49 touches) et module (24 pads, moins de commandes directes, mais des oreilles amovibles pour la mise en rack). Nous avons donc testé le modèle clavier. D’em­blée, nous sommes séduits par la qualité de construc­tion. La coque et les flancs sont tout en métal bien épais, ce qui nous fait un synthé de 10 kg pour 80 × 35 × 10,3 cm (3,6 kg et 44 × 22,3 × 7 cm pour le module, du lourd là aussi). Les commandes sont parfai­te­ment ancrées, que ce soit les 10 poten­tio­mètres, les 8 enco­deurs lisses, le gros enco­deur à LED, les 4 sélec­teurs rota­tifs, les 60 boutons-pous­soirs ou les 2 molettes. On comprend vite l’or­ga­ni­sa­tion des diffé­rentes sections dispo­nibles : arpé­gia­teur à gauche, navi­ga­tion et édition au centre, commandes dédiées pour les filtres en haut à droite et pavé de sélec­tion de modules en bas à droite.

Le clavier semi-lesté est d’ex­cel­lente facture. Rappe­lant celui du Summit de Nova­tion, il répond à la vélo­cité et à la pres­sion poly­pho­nique : cela faisait un bout de temps qu’un construc­teur de synthés ne s’était pas relancé dans ce type de clavier (on pense à Enso­niq, de 1987 avec le SQ80 à la fin des 90’s). La réponse est vrai­ment parfaite, on prend tout de suite son pied sur les pads hyper expres­sifs, ça donne envie d’ache­ter le synthé rien que pour cela. On trouve des réglages inha­bi­tuels pour la réponse en pres­sion : délai, fondu, courbe de réponse, déca­lage, relâ­che­ment… top! Un mot sur la version module, dont les pads répondent eux aussi à la vélo­cité et à la pres­sion poly­pho­nique. À part quelques commandes en moins, l’in­ter­face est quasi iden­tique au modèle clavier, le moteur sonore, lui, étant complè­te­ment iden­tique. Ce que ne possède pas le module, c’est ce grand ruban bipo­laire, capable de répondre en mode pitch­bend, modu­la­tion ou There­min (note jouée et pitch­ben­dée en même temps). Au-dessus des molettes (rétroé­clai­rées avec couleur program­mable, tout comme le gros sélec­teur de sons), on trouve des boutons de trans­po­si­tion par octave (+/- 4!) et un bouton de mémoire d’ac­cords.

Bien pensé

Hydrasynth_2tof 25.JPGL’er­go­no­mie d’édi­tion rappelle à la fois le Matrix 12, l’ESQ1, le Modu­lar G2 et le Sola­ris, avec plein de bonnes nouvelles idées. Typique­ment, on sélec­tionne un module (synthèse ou modu­la­tion) dans le pavé de modules en bas à droite, puis on édite les para­mètres à partir de 8 enco­deurs lisses et 8 pous­soirs contex­tuels placés de part et d’autre de 4 écrans OLED. Lorsqu’un module comprend plusieurs pages, deux touches permettent de les alter­ner. Lorsqu’un réglage condi­tionne une sous-page ou des valeurs addi­tion­nelles, les pous­soirs contex­tuels s’illu­minent en atten­dant nos ordres. Les enco­deurs offrent trois vitesses d’édi­tion (+ touche SHIFT pour inver­ser la préci­sion) et sont cerclés de diodes indiquant la valeur approxi­ma­tive des para­mètres asso­ciés. Pendant ce temps, l’écran OLED central affiche le nom du programme, la forme d’onde de sortie (vue oscil­lo­scope) et certains réglages sous forme graphique (filtres, enve­loppes, LFO, etc.).

L’Hy­dra­synth offre aussi des commandes directes et nombreuses pour le filtre et l’ar­pé­gia­teur, merci de les avoir sorties des menus et dotées des modes saut/seuil/rela­tif. Autre point, lorsqu’on veut assi­gner un para­mètre à une source, il suffit de main­te­nir la source (à l’écran ou dans le pavé de modules) et d’ap­puyer sur le module de desti­na­tion; le lien est créé et une page de modu­la­tions s’ouvre pour fina­li­ser les réglages. ASM n’a pas oublié les fonc­tions Init, Compare et Random, cette dernière permet­tant de lais­ser le hasard créer des programmes en agis­sant sur tout ou partie des para­mètres, au choix.

Hydrasynth_2tof 19.JPGPassons main­te­nant à la connec­tique. Une partie est située en façade. Il s’agit de prises jack 3,5 mm au format Euro­rack permet­tant à l’Hy­dra­synth de s’in­té­grer au monde modu­laire. Au programme, 2 entrées (CV assi­gnables via une matrice de modu­la­tion ou audio pour modu­ler les oscil­la­teurs) et 5 sorties (pitch CV en V/octave ou Hz/Volt, Gate V-Trig ou S-Trig, 2 modu­la­tions CV assi­gnables, horloge – avec des tensions ajus­tables). Sur le devant du modèle clavier, on discerne 2 prises casque (mini-jack et jack 6,35) avec une petite molette de volume; sur le modèle module, l’unique prise casque (jack 6,35) est située à l’ar­rière, avec le reste de la connec­tique, astu­cieu­se­ment placée en retrait.

Cette connec­tique est plutôt mini­ma­liste : sorties audio stéréo (jack 6,35 TRS), entrées pour pédale (main­tien et expres­sion), trio MIDI DIN, prise USB (MIDI unique­ment), borne pour alimen­ta­tion externe (type bloc à l’ex­tré­mité bien cheap, la seule fausse note dans cette offre top niveau) et inter­rup­teur secteur. Côté MIDI, l’Hy­dra­synth est compa­tible MPE (ce qui permet de trans­mettre des modu­la­tions poly­pho­niques note par note aux machines inté­grant ce stan­dard), trans­met des CC pour les commandes temps réel, des Sysex pour les mémoires et reçoit des données pour les mises à jour d’OS. Dommage qu’il n’y ait pas d’en­trée audio pour trai­te­ments directs dans les filtres et les effets, surtout quand on connait leur puis­sance et leur quali­té…

Large bande

Hydrasynth_2tof 09.JPGL’Hy­dra­synth est un synthé numé­rique mono­tim­bral poly­pho­nique 8 voix. On peut chai­ner deux machines pour augmen­ter la poly­pho­nie. La mémoire interne renferme 5 banques de 128 programmes, dont une partie préchar­gée d’usine; on trouve aussi la banque gratuite Inhalt en télé­char­ge­ment sur le site ASM, compo­sée de 128 programmes. On peut sélec­tion­ner les sons par caté­go­rie, ordre alpha­bé­tique ou numéro; il existe aussi 32 empla­ce­ments favo­ris pour le live. Dès les premiers tests sonores, nous appré­cions le niveau audio bien cali­bré et l’ab­sence de bruit de fond.

Nous sommes conquis par l’am­pleur des sons et les possi­bi­li­tés de modu­la­tion temps réel, en parti­cu­lier la pres­sion poly­pho­nique du clavier, le grand ruban bipo­laire, les macro commandes et le mode There­min, qui permet de jouer une voix solo avec le ruban sans affec­ter les autres voix déjà main­te­nues. On en oublie­rait presque le côté mono­tim­bral, puisque chaque note peut sonner très diffé­rem­ment des autres, grâce aux modu­la­tions indi­vi­dua­li­sées. L’ex­pé­rience avec les pads de l’Hy­dra­synth module doit être très diffé­rente; le premium de prix pour le clavier, le ruban et les commandes directes supplé­men­taires est à notre sens large­ment justi­fié, même si les pads sont tout aussi expres­sifs (vélo­cité et pres­sion poly­pho­nique).

Hydrasynth_2tof 05.JPGLes nappes sont incon­tes­ta­ble­ment le terrain de prédi­lec­tion de l’Hy­dra­synth, qu’elles soient douces, évolu­tives, métal­liques ou hybrides. De même pour les orgues type Hammond à HP tour­nant, dont les registres peuvent être réglés avec les macros, les pianos FM couleur DX7, les varia­tions de texture type PPG ou encore les fondus harmo­niques façon synthèse addi­tive. Les oscil­la­teurs en ont sous le pied, c’est indé­niable, tant sur le plan des tables d’ondes que des diffé­rentes inter­ac­tions propo­sées. De même, les filtres permettent une grande variété de timbres, par leurs modes de réponse nombreux et leurs combi­nai­sons. On appré­cie égale­ment les possi­bi­li­tés de modu­la­tion, auto­ma­tiques ou manuelles, qui font de l’Hy­dra­synth l’un des synthés les plus expres­sifs que nous ayons eus entre les oreilles.

La section effet assure vrai­ment bien, en quan­tité comme en qualité. Elle est respon­sable de grands ensembles stéréo planants. Autre point de satis­fac­tion, l’ar­pé­gia­teur qui renferme plein de réglages malins permet­tant d’agré­men­ter les motifs en évitant le côté répé­ti­tif : diffé­rents modes de scan, des motifs variés, des Ratchets avec déclen­che­ments aléa­toires, on ne s’en­nuie pas! La banque son propose aussi des percus­sions style analo­gique hyper pêchues et un tas d’ef­fets spéciaux déjan­tés. Là où l’Hy­dra­synth est un peu moins à l’aise, c’est sur les basses claquantes. Il sait sonner gras mais n’a pas la grosse patate d’un analo­gique mono­pho­nique, c’est indé­niable. Signa­lons pour clore ce chapitre sonore qu’un biblio­thé­caire PC/Mac est télé­char­geable sur le site du construc­teur, merci.

01 PolyAT Pad
00:0001:32
  • 01 PolyAT Pad01:32
  • 02 PolyAT Fanta­sia01:06
  • 03 Arpette Ratchet01:41
  • 04 Macror­gan01:45
  • 05 FM Ribon00:41
  • 06 DuoAT Fret­less01:00
  • 07 Bass and Filters01:25
  • 08 Bass Waves00:41
  • 09 Q Bass00:47
  • 10 Shad­dap01:04
  • 11 Simple Strings00:46
  • 12 One-Patch Drums01:35

Oscil­la­teurs en trio

Hydrasynth_2tof 15.JPGLa struc­ture de l’Hy­dra­synth est plus musclée que ce que l’on trouve sur un synthé sous­trac­tif clas­sique : 3 oscil­la­teurs complexes, 4 mutants (trans­for­ma­tions audio), un modu­la­teur en anneau, un géné­ra­teur de bruit, un mélan­geur, deux filtres, un ampli stéréo, 4 effets, 5 enve­loppes, 5 LFO, une matrice de modu­la­tion et un arpé­gia­teur. De quoi bien s’amu­ser! Commençons par les oscil­la­teurs. Les deux premiers peuvent fonc­tion­ner en mode simple ou en table d’onde, alors que le troi­sième ne possède que le mode simple. En mode simple, l’os­cil­la­teur charge une forme d’onde unique parmi une liste de 219 ondes courtes au contenu harmo­nique varié.

Au programme, des ondes clas­siques sinus – triangle – dent de scie – carré – diffé­rentes impul­sions tirées de synthés analo­giques (certaines inspi­rées de machines vintage bien connues), des ondes numé­riques (très inspi­rées pour certaines), des spectres, des réso­nances, des orgues, des formants, des voix, des percus­sions mono­cy­cliques, des séries harmo­niques… et beau­coup de timbres assez indes­crip­tibles mais ô combien utiles dès qu’il s’agit d’ex­pé­ri­men­ter diffé­rentes inter­mo­du­la­tions d’os­cil­la­teurs (nous en repar­le­rons en détail au chapitre suivant). On peut accor­der les oscil­la­teurs par demi-ton (+/- 36) et par centième (+/- 50). Le suivi de clavier varie de 0 à 200 %, sympa et utile, là encore, pour les modu­la­tions audio. Rien n’est donc laissé au hasard.

En mode table d’ondes, on place 1 à 8 ondes diffé­rentes (parmi la liste de 219, iden­tique à celle du mode simple) en 8 points d’une table fictive, sur les posi­tions 1 à 8 équi­dis­tantes. On défi­nit ensuite le point de lecture de la table entre les posi­tions 1,0 et 8,0, par pas de 0,1. Sur une valeur entière (1–2–3–4–5–6–7–8), la lecture commence sur une onde donnée. Sur une valeur déci­male, la lecture est un mélange des deux ondes de part et d’autre du point d’in­dex (par exemple, un index de 1,5 produit un mélange à 50/50 des ondes placées en posi­tions 1 et 2). Bien évidem­ment, le point de lecture peut être modulé par un tas de sources internes et externes via la matrice de modu­la­tion, dans tous les sens et avec tous les niveaux d’in­ten­sité. De quoi évoquer les PPG Wave et autres machines à tables d’ondes. Une table d’onde ne consomme qu’une voix de poly­pho­nie, tant mieux!

Mutants en quatuor

Les deux premiers oscil­la­teurs offrent des possi­bi­li­tés de modu­la­tion audio appe­lées mutants, agis­sant plus ou moins violem­ment sur le contenu harmo­nique. Il y a quatre mutants en tout, iden­tiques, à raison de deux mutants par oscil­la­teur, placés en série (voir photos en gros plan du pavé de sélec­tion des modules). La sortie d’un mutant s’ap­pa­rente à un oscil­la­teur trans­formé, donc une source audio à part entière, envoyée dans le mutant suivant (mutants 1 et 3) ou dans le mixeur (mutants 2 et 4). Chaque mutant peut opérer suivant diffé­rents types de modu­la­tion : FM linéaire, empi­lage d’ondes, synchro, PWM clas­sique, PWM compres­sée, PWM sur mesure, harmo­nique.

Hydrasynth_2tof 16.JPGPremier type de mutant, la FM linéaire corres­pond à un ensemble porteur/modu­la­teur; le porteur est l’os­cil­la­teur relié au mutant; on choi­sit la source de modu­la­tion (sinus, triangle, oscil­la­teurs 1–2–3, modu­la­teur en anneau, mutants 1–2–3–4, entrée Mod 1–2), le ratio (de 0,250 à 64,000), la profon­deur FM (1.280 valeurs), le feed­back (0–150 %) et la balance son sec/traité. C’est vrai­ment top de pouvoir modu­ler n’im­porte quelle forme d’onde avec n’im­porte quelle autre, y compris elle-même ou une entrée audio! Les résul­tats sont hyper variés et très vite bien barrés. Deuxième type de mutant, l’em­pi­lage d’os­cil­la­teurs : cinq copies de l’onde de base sont empi­lées, désac­cor­dées suivant un para­mètre de profon­deur et dosées avec une balance son sec/traité; le rêve pour les amateurs d’EDM (Hoover où es-tu?) sans consom­mer de poly­pho­nie.

Troi­sième type de mutant (celui d’une rencontre?), la synchro : on peut choi­sir la source parmi les 3 oscil­la­teurs, le ratio (ce qui permet de divi­ser ou multi­plier le cycle de synchro de 0,250 à 64,000 fois, un réglage très origi­nal), la profon­deur, le feed­back et la balance son sec/traité; on appré­cie au passage l’ex­cel­lente propreté du moteur interne, qui évite l’alia­sing dans les pires modu­la­tions. Les quatrièmes, cinquièmes et sixièmes types de mutants sont dédiés à la PWM : clas­sique, par compres­sion d’im­pul­sion et par impul­sions person­na­li­sées; on retrouve les réglages de ratio, profon­deur, feed­back et balance son sec/traité. Le mode person­na­lisé permet de créer 8 points de largeurs d’im­pul­sion diffé­rentes à l’in­té­rieur d’un même cycle : suivant le ratio, tout ou partie de ces morceaux d’im­pul­sion sont modu­lés.

Enfin, le septième type de mutant fait varier le contenu harmo­nique de l’onde, augmen­tant certaines bandes de fréquences et dimi­nuant les autres; le para­mètre de ratio permet de se bala­der dans les harmo­niques; en appuyant simul­ta­né­ment sur SHIFT, on saute d’har­mo­nique en harmo­nique; les autres réglages sont communs aux autres mutants : profon­deur, feed­back, balance. Nous verrons plus tard que tous ces para­mètres sont modu­lables en temps réel par des fonc­tions macro ou des sources de la matrice de modu­la­tion. Cela permet de créer des sons dyna­miques hyper évolu­tifs à diffé­rentes vitesses, surtout quand on mélange cela aux tables d’ondes et que l’on fait agir les quatre mutants en même temps, impres­sion­nant!

Duo de filtres

Hydrasynth_2tof 07.JPGAvant d’at­taquer les filtres, les sources sont mélan­gées dans un mixeur à 5 entrées (3 oscil­la­teurs, modu­la­tion en anneau, bruit à trois couleurs) et 2 sorties stéréo routées vers chaque filtre. Ainsi, pour chaque source, on trouve un volume, un pano­ra­mique et une balance vers les deux filtres. L’édi­teur permet d’iso­ler ou couper rapi­de­ment une source. Magni­fique! C’est aussi à ce stade que l’on route les deux filtres, en série ou en paral­lèle. Chacun est très diffé­rent et très complé­men­taire de son acolyte.

Commençons par le premier filtre, de type multi­mode réso­nant. On trouve les modes passe-bas en échelle clas­sique 2 et 4 pôles (type Moog), passe-bas en échelle compen­sée 2 et 4 pôles, passe-bas à porte (type Buchla), passe-bas MS20 modé­lisé, passe-haut MS20 modé­lisé, 3 pôles multi­mode Three­ler et un filtre à voyelles. Les filtres compen­sés corrigent la perte de basses fréquences quand on pousse la réso­nance, bien connue sur la plupart des synthés et rare­ment compen­sée. Le filtre passe-bas à porte modé­lise le compor­te­ment d’un filtre Buchla combi­nant filtre et ampli. Le filtre Three­ler est un modèle combi­nant 3 filtres 1 pôle en modes passe-bas/passe-bande/passe-haut, tel que l’on trouve sur le module Euro­rack de Ian Fritz. Enfin, le filtre à voyelles permet d’en­chai­ner et modu­ler des formants de voix AEIOU dans 8 ordres diffé­rents.

Hydrasynth_2tof 17.JPGTous les réglages sont hyper précis (1 280 valeurs pour la fréquence de coupure du filtre, par exemple), parfai­te­ment lisses, expri­més en leur véri­table unité, comme tous les para­mètres de l’Hy­dra­synth, démon­trant encore le soin ultime (ce qui va de pair avec le respect du client) apporté par les déve­lop­peurs. La réso­nance est auto-oscil­lante, son éner­gie et sa stabi­lité varient beau­coup d’un mode de filtrage à l’autre. La fréquence de coupure peut être direc­te­ment modu­lée par le LFO1, l’en­ve­loppe 1, la vélo­cité sur l’en­ve­loppe et le suivi de clavier (+/- 200 % pour ce dernier, bien vu!). Un Drive peut être placé en amont ou en aval du filtre, afin d’ajou­ter un peu de satu­ra­tion au signal.

Le second filtre est de type 2 pôles réso­nant à variable d’état, permet­tant de passer progres­si­ve­ment entre les modes LP-BP-HP, exac­te­ment comme sur un SEM Oberheim. Parfai­te­ment complé­men­taire au premier filtre, il en reprend en grande partie les para­mètres, à l’ex­cep­tion du Drive qui a disparu et du Morphing qui est venu s’ajou­ter à la liste. Les modu­la­tions préas­si­gnées sont iden­tiques à celles du premier filtre; le Morphing est quant à lui une desti­na­tion de modu­la­tion.

Voix accom­mo­dées

En sortie de filtres, le signal passe par un ampli stéréo, dont on peut régler le niveau, l’ac­tion du LFO2 et la vélo­cité. Le reste a soit été réglé dans le mixeur avant filtre (niveaux et pano­ra­miques indi­vi­duels), soit se passe dans la matrice de modu­la­tion ou les macros. Les huit voix de l’Hy­dra­synth peuvent être jouées suivant diffé­rents modes : en poly­pho­nie, en mono (avec diffé­rentes prio­ri­tés), à l’unis­son. Dans ce dernier mode, on peut régler la densité des voix et leur désac­cor­dage. Quelques para­mètres permettent de simu­ler le compor­te­ment des synthés analo­giques : phase libre des oscil­la­teurs (non redé­clen­chée) et fluc­tua­tions.

Un para­mètre d’élar­gis­se­ment stéréo permet de jouer chaque voix plus ou moins loin de la valeur centrale, de manière ordon­née ou aléa­toire, que l’on soit en poly­pho­nie ou à l’unis­son. ASM a récem­ment ajouté un « mode chaud », permet­tant de renfor­cer les basses et d’at­té­nuer les aigus, certains ayant trouvé le son de l’Hy­dra­synth un peu froid. C’est aussi dans le mode voix que l’on peut régler le Glide (linéaire, expo­nen­tiel ou loga­rith­mique), le vibrato (un sixième LFO assi­gné au pitch global), le tempé­ra­ment clavier (38 présé­lec­tions et un mode utili­sa­teur) et le Snap (très utile pour ajou­ter de la patate sur les attaques courtes). C’est très complet!

Effets dyna­miques

Hydrasynth_2tof 11.JPGLa sortie de l’am­pli attaque une section de quatre effets en série avant de rejoindre l’ex­té­rieur. Au programme, un multief­fets préef­fets, un délai, une réverbe et un multief­fets post effets. Les deux multief­fets ont des para­mètres et algo­rithmes iden­tiques : chorus, flan­ger, haut-parleur tour­nant, phaser, lo-fi, tremolo, EQ et compres­seur. Chacun offre sept para­mètres éditables via le menu, le dernier étant la balance son sec/traité. Certains para­mètres, prédé­fi­nis dans chaque algo­rithme, peuvent être modu­lés en temps réel via la matrice. Signa­lons au passage que le compres­seur dispose d’une Side­chain, à choi­sir parmi l’hor­loge interne, le bouton Tap Tempo ou l’une des deux entrées de modu­la­tion : vive le Ducking en rythme!

Le troi­sième effet est dédié aux délais. On en trouve cinq types : mono, stéréo, ping­pong, LRC et inversé. Cette fois, six para­mètres sont dispo­nibles, la plupart modu­lable via la matrice de modu­la­tion, le temps étant pour sa part synchro­ni­sable à l’hor­loge. Le troi­sième effet est dédié aux réverbes. On en trouve quatre types : hall, room, plate, cloud. Six para­mètres sont de nouveau dispo­nibles, là encore pour la plupart modu­lables en temps réel. Un mode spécial permet de geler la queue de réver­bé­ra­tion. Enfin, le quatrième effet est iden­tique au premier; simple­ment il est en bout de chaine. Une bien belle section, très soignée sur le plan de l’er­go­no­mie, des modu­la­tions et des sono­ri­tés.

Modu­la­tions musclées

Il suffit de regar­der l’Hy­dra­synth pour devi­ner qu’il excelle au rayon des modu­la­tions. On ouvre le bal avec cinq enve­loppes DAHDSR iden­tiques, assi­gnables à la plupart des para­mètres de la machine. Les deux premières sont préas­si­gnées aux filtres et à l’am­pli, mais rien n’em­pêche de les router vers d’autres modules. Les segments de temps vont de 0 ms à plusieurs dizaines de secondes suivant le cas; ils peuvent aussi être synchro­ni­sés à l’hor­loge et s’ex­priment dans ce cas en divi­sions ou multiples tempo­rels (de 1/64T à 16 mesures). Les courbes des segments ADR sont modi­fiables en continu, de loga­rith­mique à expo­nen­tielle, ce qui offre des profils de réponse très variés, du plus claquant au plus progres­sif. L’écran central affiche le profil de l’en­ve­loppe en temps réel, une aide précieuse. Les enve­loppes peuvent être déclen­chées en mode legato, recom­men­cées au début en cas de débord de poly­pho­nie, pour­sui­vies libre­ment ou bouclées (2 à 50 fois, ou à l’in­fini). On peut copier les para­mètres d’une enve­loppe vers une autre, pratique.

Hydrasynth_2tof 24.JPGPassons aux LFO, au nombre de cinq égale­ment, tous iden­tiques. Là encore, les deux premiers LFO sont préas­si­gnés aux filtres et à l’am­pli, mais on peut en faire plein d’autres choses. On trouve 11 formes d’ondes distinctes, avec les grands clas­siques, un S&H, un bruit, une onde aléa­toire et des pas program­mables. Dans ce dernier cas, on se fabrique sa propre forme d’onde à partir de huit points de modu­la­tion. La fréquence varie de 0,02 à 150 Hz et s’ex­prime en multi­pli­ca­tion/divi­sion tempo­relle lorsqu’on les synchro­nise au tempo. Les LFO de chaque voix peuvent oscil­ler sépa­ré­ment ou être liés. On peut aussi régler un délai, un fondu d’en­trée, une phase d’onde et un niveau de modu­la­tion. La forme d’onde peut être plus ou moins adou­cie. On trouve même un mode de lecture à cycle unique, le LFO se compor­tant alors comme une mini enve­loppe, bien vu! 

Passons main­te­nant au mode macro, une excel­lente idée là encore. Lorsqu’on sélec­tionne un nouveau son ou qu’on est en mode Home, les 8 enco­deurs de part et d’autre des 4 écrans OLED permettent de contrô­ler chacun 8 para­mètres diffé­rents, avec modu­la­tions bipo­laires indé­pen­dantes. Par exemple, tour­ner un enco­deur peut en même temps ouvrir la fréquence d’un filtre, bais­ser la réso­nance d’un autre, augmen­ter la vitesse d’un LFO et dimi­nuer le temps de réverbe. Pour assi­gner une desti­na­tion à l’un des 8 empla­ce­ments d’un enco­deur, il suffit de main­te­nir le bouton corres­pon­dant à l’em­pla­ce­ment et d’ap­puyer sur un module, puis de fina­li­ser les réglages (para­mètre desti­na­tion du module et quan­tité de modu­la­tion). Une fois les réglages effec­tués, on peut nommer la macro (via une liste de Presets ou en repar­tant de zéro). C’est très rapide et appré­ciable en temps réel!

Dernier module de modu­la­tion, et non des moindres, la matrice : dotée de 32 cordons virtuels, elle permet de router plus de 100 sources vers plus de 200 desti­na­tions, avec modu­la­tions bipo­laires. L’as­si­gna­tion est ultra simple, en main­te­nant deux boutons (source puis desti­na­tion) dans le pavé de modules, puis en fina­li­sant les réglages via la section d’édi­tion. Parmi les sources, citons les enve­loppes, les LFO (bipo­laires et posi­tifs), la pres­sion (poly­pho­nique et mono­pho­nique), le suivi de clavier, la vélo­cité (initiale, de relâ­che­ment), les molettes, le ruban (absolu bipo­laire, absolu unipo­laire, rela­tif), la pédale d’ex­pres­sion, les deux entrées CV, les para­mètres MPE (X, Y absolu, Y rela­tif, vélo­cité de relâ­che­ment) et les CC MIDI de 0 à 127.

Parmi les desti­na­tions, l’ar­pé­gia­teur (10 para­mètres), les oscil­la­teurs (pitch et posi­tion d’onde), les mutants (une bonne douzaine de para­mètres), le modu­la­teur en anneau, le mixeur (tous les volumes, pano­ra­miques, balances vers les filtres), les filtres (suivant le type : coupure, réso­nance, drive, formant, morphing, modu­la­tions préas­si­gnées), le volume, les para­mètres d’ef­fets prédé­fi­nis, chaque segment d’en­ve­loppe, la vitesse et la quan­tité de chaque LFO, les 32 cordons de modu­la­tions (modu­la­tion de modu­la­tion), les 2 sorties CV, les CC MIDI (0 à 127). C’est on ne peut plus complet, puis­sant, tout en restant très facile à program­mer, bravo là encore!

Arpé­gia­teur avancé

Hydrasynth_2tof 13.JPGImpos­sible de passer à côté de l’ar­pé­gia­teur de l’Hy­dra­synth, surtout sur le modèle clavier, qui possède 4 poten­tio­mètres, 4 sélec­teurs rota­tifs et 4 inter­rup­teurs dédiés en façade (4 sélec­teurs rota­tifs et 4 inter­rup­teurs seule­ment pour le module). On appré­cie ce luxe de commandes directes, car l’ar­pé­gia­teur est un module temps réel, bien trop souvent relayé au fin fond des menus sur de nombreux synthés. Ici, on peut s’écla­ter sur une boucle en la tritu­rant dans tous les sens. On accède ainsi direc­te­ment au tempo, au nombre de Ratchets (1–2–4–8), à leur proba­bi­lité d’ap­pa­ri­tion (0–100 %), au temps de porte, au mode de lecture (haut, bas, alterné avec répé­ti­tion des notes extrêmes, alterné sans répé­ti­tion, accord, motif, ordre joué, aléa­toire), au nombre d’oc­taves trans­po­sées (1 à 4), à la divi­sion tempo­relle (1/4, 1/8, 1/16, 1/32, avec inter­rup­teur séparé acti­vant les versions ternaires) et au swing (8 valeurs allant de 0 à 75 %).

Toujours avec des inter­rup­teurs dédiés, on peut entrer le tempo en temps réel (TAP), main­te­nir l’ar­pège en cours (LATCH, mais pas ajou­ter de notes aux notes main­te­nues) et main­te­nir les notes enfon­cées (comme avec une pédale de main­tien). Pour aller plus loin dans l’édi­tion, une pres­sion sur SHIFT+E­DIT permet d’ac­cé­der à deux pages de para­mètres, certains repre­nant les para­mètres en façade tels quels, d’autres avec des réglages plus précis (par exemple 12 divi­sions tempo­relles avec modes ternaires, 26 réglages de swing…) et d’autres, encore, supplé­men­taires (mode de trans­po­si­tion d’oc­tave, longueur d’ar­pège, phrase d’ar­pège parmi 64 motifs). Un très bel arpé­gia­teur, dont les notes peuvent être trans­mises via MIDI.

Essai concluant

L’Hy­dra­synth est une excel­lente surprise et assu­ré­ment un coup de maître. Une pano­plie sonore très large, des oscil­la­teurs mutants, des filtres costauds, des modu­la­tions richis­simes, de très bons effets, le tout servi par une inter­face inno­vante, aussi bien pensée pour jouer que pour program­mer. Écrans contex­tuels, raccour­cis pour créer des modu­la­tions, macro commandes, édition intui­tive, clavier à pres­sion poly­pho­nique, ruban, connec­tique CV/Gate, tout cela ressemble à un sans-faute. En fait, l’Hy­dra­synth concentre le meilleur de ce que la synthèse nous a apporté en matière d’ex­pé­rience utili­sa­teur. La qualité de construc­tion est égale­ment de tout premier ordre, que ce soit par le choix des maté­riaux que les ajus­te­ments. Tout est costaud et bien en place.

Alors, certes, on peut repro­cher la poly­pho­nie de 8 voix et le géné­ra­teur sonore mono­tim­bral, pour un synthé entiè­re­ment numé­rique. De même, une entrée audio directe et l’au­dio via USB auraient été appré­ciables. Quant à cette alimen­ta­tion exter­ne… Mais c’est bien chipo­ter compte tenu des points forts au regard du tarif annoncé. Ce n’est pas tous les jours qu’on accueille ce genre d’ex­tra­ter­restre au son aussi singu­lier. Comme dirait l’un de nos membres passé tester la machine au studio, on ne sait pas trop quel Award mettre, entre inno­va­tion ou qualité/prix. Si c’était possible, on lui mettrait les deux!

 

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9/10
Award Innovation 2020
Points forts
  • Excellente qualité de construction
  • Aftertouch polyphonique
  • Ruban (modèle clavier)
  • Interface utilisateur innovante
  • Qualité sonore pleine d’expressivité
  • Interaction des oscillateurs
  • Filtres multiples
  • Matrice de modulation
  • Précision des réglages
  • Effets de grande qualité
  • Arpégiateur très souple
  • Intégration MIDI et MPE
  • Section CV/Gate
  • Rapport qualité/prix
Points faibles
  • Polyphonie réduite
  • Monotimbral
  • Pas d’entrée audio directe
  • Pas d’audio via USB
  • Alimentation externe cheap
Auteur de l'article synthwalker Passionné de synthés, concepteur produits et rédacteur presse

J'aime tous les synthés, avec une préférence pour les poly vintage à mémoires, qui m'accompagnent depuis le début des 80's. J'écris depuis 25 ans sur les synthés et j'ai contribué au développement de certains d'entre eux. Plusieurs centaines de mes articles ont été publiés sur Audiofanzine et auparavant dans les magazines PlayRecord, Recording, Keyboards, Musicsound et Musiciens.


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